Abstract : In the age of artificial intelligence, the aim of this article is to observe its use in two complementary university spaces dedicated to learning: university courses and academic libraries. Firstly, using learning analytics, we look at how students sometimes use this technology in class, when they have to produce a written work in a limited time, which requires them to have informational and writing skills. Secondly, we'll be observing these students when they have to produce academic work, and to do so, they use all the resources made available by the academic libraries and rely on the help provided by professionals to achieve this.
In this case, we rely on the findings of these professionals, in contact with these students, and on their questioning of the emergence of new information practices and the necessary adaptations arising from them. Our results show the emergence of new practices among students linked to the development of generative AI, and the need for training among library professionals in charge of user training, in order to be able to train and support them in the new uses of informational research.
Keywords: Generative artificial intelligence, ChatGpt, information retrieval, higher education, university libraries
INTRODUCTION
Le numérique, permet à l’humain depuis plusieurs décennies, de communiquer et de discourir à partir de technologies innovantes (Paveau, 2017). Son utilisation appliquée à la documentation permet aux étudiants d’accéder à de nombreuses informations numérisées sous forme de ressources électroniques indexées notamment par les bibliothèques. Métamorphosées en centres d'accès à l'information, ces dernières détiennent des ressources d'information sous des formes traditionnelles et électroniques.
Les technologies d'intelligence artificielle sont désormais présentes dans de nombreux domaines de l’activité humaine. Dans la documentation, le déploiement de ces technologies dans les bibliothèques a permis de développer la mise à disposition et l'utilisation de ressources électroniques ou e-ressources (Welshman, 2004), qui facilitent la réalisation de buts et d’objectifs (Ajakaye, 2022).
L'intelligence artificielle (IA) désigne le domaine de l'informatique qui se concentre sur la création de systèmes intelligents capables d'effectuer des tâches d'écriture (Ribeiro, 2021). Les technologies qui s’y rapportent ont envahi de nombreux domaines de l’activité humaine. L'IA générative (GenAI), sous-ensemble de l'IA, est un terme général qui peut être utilisé pour tout système d'IA dont la fonction principale est de générer du contenu, notamment des générateurs d'images de grande taille, des modèles de langage, des outils de génération de code ou outils de génération audio (Friedland, 2023). La plupart, sinon la totalité de ces IA génératives, ont été construites sur des données récupérées, généralement sans autorisation, sur Internet (Chesterman, 2023). Cette procédure de création de contenu peut encore, dans une certaine mesure, être considérée comme analytique car elle est intrinsèquement probabiliste, ses résultats pouvant être créatifs, parfois inattendus voire erronés puisque l'IA générative combine des éléments de manière inédite. Les résultats parfois très contrastés que produisent les IA génératives ne semblent pas décourager leur usage dans un cadre académique.
Dans cette étude, les IA génératives (IAG) auxquelles nous faisons référence sont les outils numériques, logiciels, applications, plateformes web qui intègrent la technologie de l'intelligence artificielle (IA) générative. Celles-ci sont désormais capables d'effectuer des tâches génératives informationnelles et communicationnelles, comme la création de contenu telles que des références bibliographiques.
L’impact des IAG sur l’expérience d’apprentissage a été démontré (Ayeni et al, 2024) d’où son utilisation à l’université. Applications à la croissance plus rapide que Facebook et WhatsApp, ces technologies sont mobilisées, depuis peu, par les étudiants, dans le cadre de leurs travaux universitaires (Mazarakis et al., 2023), afin d’accéder plus rapidement et plus directement à l'information (Crevier et al., 2023 ; Kooli, 2023 ; Uzan et al., 2024). Ces travaux sont notamment réalisés dans deux types d’espaces d’apprentissage institués et complémentaires : les cours à l’université et les bibliothèques universitaires.
Cet article tentera de comprendre, d’une part, les logiques et les stratégies qui orientent les choix des étudiants dans l’usage ou non de ces technologies et d’explorer leurs pratiques liées aux IAG dans le cadre de recherche d’information, en cours. D’autre part, il s’agira de recueillir les avis des professionnels des bibliothèques universitaires, au contact de ces apprenants qui, dans ces lieux, expriment parfois de nouveaux besoins, demandes et attentes en matière d’usage de ces IAG, à finalité informationnelles et communicationnelles.
Il s’agit de comprendre les difficultés que rencontrent ces professionnels, dans la nécessaire adaptation professionnelle à l’évolution des IAG et des usages qui en découlent. De même, se pose la question de la formation des usagers confrontés à ces nouveaux types d’outils pour accéder à l’information scientifique et technique et les pistes d’action envisagées.
L’article s’articulera en trois volets. Une première partie proposera un état de l’art sur l’usage des IAG dans le cadre de la recherche d’informations en milieu universitaire, suivie des questions de recherche et hypothèses, le terrain choisi et les outils méthodologiques mobilisés. Le deuxième volet présentera les perspectives des usagers. Il s’agira de présenter les résultats de l’analyse des usages des IAG par les étudiants en contexte de travail universitaire en observant notamment leurs stratégies pour rédiger les requêtes, l’évaluation des résultats obtenus depuis celles-ci et le livrable produit dans un cadre universitaire, s’appuyant sur les ressources obtenues.
Le troisième volet portera sur les perspectives des professionnels des bibliothèques. Ces gestionnaires de l'information ont pour missions, entre autres, de s’adapter à l’évolution des technologies, des pratiques et des demandes des usagers et de former les utilisateurs à un emploi aussi large que possible des nouvelles technologies d’accès à l’information scientifique et technique (Hussain, 2023). Il s’agira de présenter leurs points de vue sur les usages des étudiants dans le cadre de recherche documentaire et les pistes d’action possibles notamment dans le cadre de leur charge de formation aux compétences informationnelles (ADBU, 2022).
ÉTAT DE L'ART
Dans notre état de l’art nous revenons sur l’impact des IA dans l’activité humaine et notamment dans le traitement de l’information. Nous caractérisons une de ses nouvelles formes, l’IA générative, du point de vue fonctionnel et juridique, en présentant l’accueil et la place accordée dans le domaine éducatif, de même que les usages constatés, chez les jeunes utilisateurs, ainsi que les problèmes et risques qu’elle soulève, d’où l’opportunité de conduire de nouvelles études.
L’IA générative, une innovation majeure
L'IA constitue un des piliers de la stratégie de puissance des Etats-Unis et de la Chine. Elle possède une histoire de plus de 70 ans et les systèmes d’IA ont déjà de très nombreuses applications dans nos services publics, dans notre quotidien et dans notre économie.
De plus, l’IAG constitue un tournant majeur de l’histoire de l’innovation. L’IA est qualifiée de générative puisqu’elle peut générer de nouveaux contenus sous la forme de texte, image, son, vidéo ou code. Le lancement de Chat GPT, fin 2022, a été un accélérateur par sa simplicité d’utilisation, sa rapidité de génération de contenus, le réalisme du contenu généré et par ses importantes aptitudes. Sa diffusion très rapide dans de nombreux produits et services lui confère un pouvoir transformateur (Gouvernement, 2024).
L’IAG, un apprentissage automatique en continu
Entraînés à partir de grands volumes de données variées, les systèmes d'IA génératives reposent sur l'apprentissage automatique. Ces systèmes créent des modèles de fondation, aussi appelés modèles à usage général, capables d'effectuer diverses tâches, comme les grands modèles de langue formés sur de vastes corpus de textes.
Une fois le modèle entraîné, les utilisateurs peuvent soumettre des requêtes auxquelles l'IA répond en produisant de nouvelles données similaires aux données d'entraînement. Cependant, ces modèles ne comprennent pas la signification des mots, des images ou des sons qu'ils génèrent. La signification est attribuée par les humains qui interprètent ces réponses.
Ainsi, le rapport de la commission de l’intelligence artificielle (2023) pointe trois risques : des risques liés aux imperfections, des risques liés à une utilisation malveillante et des risques systémiques. La prudence est requise avec l'utilisation actuelle des modèles d'IAG, car ils ne sont pas encore des sources fiables d'informations véridiques, contrairement aux encyclopédies. Ils peuvent produire des réponses erronées, appelées hallucinations ou confabulations, ce qui représente un domaine à améliorer pour ces systèmes (Gouvernement, 2024). C’est pourquoi utiliser des IAG pour effectuer une recherche documentaire constitue un risque. Les data-scientists suggèrent d’utiliser le modèle RAG (retrieval augmented generation, génération augmentée de récupération), sur-ensemble de l’IAG, qui combine les forces de l’IAG et de l’IA d’extraction. Ce modèle permet également de traiter et de consolider les connaissances pour créer des réponses, des instructions ou des explications uniques, adaptées au contexte et rédigées dans un langage proche de celui des humains, au lieu de se contenter de résumer les données extraites.
Textes régissant l’IA
Adopté en mai 2019, le Consensus de Beijing sur l’intelligence artificielle (IA) et l’éducation est le premier document proposant des conseils et des recommandations sur les meilleures façons d’exploiter les technologies de l’IA pour la réalisation de l’agenda pour l’éducation 2030. Il affirme que le déploiement de l’IA dans l’éducation offre le potentiel d’améliorer les capacités humaines et de protéger les droits de l’homme en vue d’une collaboration efficace entre l’homme et la machine. Il déclare que l'intégration systématique de l'IA dans l'éducation peut permettre de relever certains des plus grands défis actuels de l'éducation et d’accélérer les progrès de la réalisation de l’ODD 4 (objectif de développement durable n°4 adoptés en 2015 par l’Assemblée générale des Nations unies), qui concerne la thématique d’une éducation de qualité, objectif nᵒ 4 parmi les 17 objectifs de développement durable.
Le 14 juin 2023, le Parlement européen a adopté sa position de négociation au sujet de la loi sur l'IA[1]. La priorité du Parlement est de veiller à ce que les systèmes d'IA utilisés dans l'UE soient sûrs, transparents, traçables, non discriminatoires et respectueux de l'environnement. Quatre risques ont été identifiés : (1) Risques limités : chatbot, (2) Risques acceptables, (3) Risques élevés tels que les IA d’aujourd’hui type ChatGPT, (4) Risques inacceptables tels que la notation sociale. Le Conseil de l'Europe a adopté le 17 mai 2024 un traité international visant à garantir une IA respectueuse des droits fondamentaux. Le 21 mai 2024, les États de l'Union européenne (UE) ont approuvé le règlement européen sur l'intelligence artificielle (IA).
Réception de l’IA dans le domaine éducatif
Selon l’étude Compilatio conduite en 2023, il semble exister un fort décalage entre la perception enseignante de l’usage fait par les étudiants et sa réalité. 88% des enseignants français pensent que les étudiants y ont recours de façon permanente alors que seulement 55% l’utilisent occasionnellement[2].
80% sont persuadés que les étudiants dupliquent les résultats obtenus, quand seulement 9% le font réellement. En raison de la perception négative de l'outil par les autorités universitaires, peu d'étudiants (36%) osent déclarer à leurs enseignants qu'ils utilisent une IAG (étude KPMG, 2023).
L'arrivée des intelligences artificielles génératives (IAG) a bouleversé les pratiques des enseignants, soulevant de vives questions sur le plagiat et l'évaluation. En effet, ces outils offrent de nouvelles possibilités pour les étudiants, mais ils posent également de nouveaux défis en matière de vérification de l'authenticité des travaux rendus. Comme le souligne Anders (2023), les formateurs se trouvent confrontés à la nécessité de repenser leurs méthodes d'évaluation pour s'adapter à ce nouveau contexte.
L’usage des IAG par les 16-25 ans
Le taux de connaissance des outils d’IAG varie selon les tranches d’âge et le niveau d’études. Les 18 à 24 ans sont les plus nombreux (43%) à utiliser des outils d’intelligence artificielle comme ChatGPT, Google Bard, Midjourney ou Dall-E (CREDOC, 2023).
Selon Diplomeo (2024), 79% des jeunes de 16 à 25 ans utilisent l’IA pour leur étude ou leur orientation. 55% l’utilisent au moins une fois par mois, 25% l’utilisent toutes les semaines et 21% tous les jours.
Concernant leurs motivations, les jeunes utilisent les IAG pour plusieurs raisons : trouver de l’inspiration (46%), acquérir des connaissances rapidement (41%), produire du contenu lié aux études (61%), aider à rédiger leur lettre de motivation pour une formation (44%), s’amuser (25%), rédiger des mails (23%), organiser son temps (10%) (Diplomeo, 2024).
Une autre étude conduite en Allemagne auprès de 6300 étudiants montre que les outils basés sur les IAG tels que ChatGPT ont trouvé leur place parmi les étudiants dans tous les domaines d'études bien que les domaines de l'ingénierie, des mathématiques et des sciences naturelles affichent la plus forte intensité (Von Garrel et Mayer, 2023).
Dans une autre étude (Lobet et al. 2023), les raisons principales relevées dans l'utilisation de ChatGPT par les étudiants incluent la définition de mots ou de concepts (65%), la compréhension d'une partie de cours (51%), l'illustration de concepts (46%) et la résolution d'exercices (34%). En outre, 35% des étudiants affirment rédiger tout ou partie de leurs devoirs grâce à des outils d'IAG comme ChatGPT et 47 % des étudiants utilisateurs de l’IA affirment qu’ils ont de meilleures notes grâce à son utilisation.
De plus, selon l’étude KPMG (2023), les étudiants ne vérifient pas systématiquement l'exactitude du contenu généré par l'IA, seulement 37 % d'entre eux déclarent faire une vérification des faits.
Une étude menée à l'université de Namur s’est penchée sur l'utilisation réelle de ChatGPT par les étudiants de première année dans toutes les sections de l'université (Lobet et al. 2023). Le sondage révèle que, contrairement aux attentes, ChatGPT n'est pas l'IA la plus utilisée par les étudiants pour leurs études, avec seulement 13% d'utilisateurs déclarés. Google Translate, DeepL et Google Search Image sont les applications les plus mobilisées. L’auteur souligne une confusion chez certains étudiants quant à la définition des IA. En effet, certains ont inclus des noms d'applications qui n'utilisent pas d'IA dans la catégorie "j'utilise d'autres IA". De plus, les principaux utilisateurs de ChatGPT dans le cadre académique sont les étudiants des facultés de sciences économiques, politiques et de gestion, d'informatique et de médecine.
L'utilisation intensive redoutée par les enseignants ne concerne qu'une petite partie des étudiants interrogés, soit environ 6% de l'échantillon total (1233 étudiants). De plus, 66% des étudiants déclarent être seulement quelques minutes sur ChatGPT.
Par ailleurs, l'étude de Compilatio (2023) révèle aussi que les outils d’IAG ne remplacent pas les moteurs de recherche : les étudiants déclarent encore à 77% utiliser les moteurs de recherche comme principale source de documentation. Et l’IA est citée comme “1ère source de documentation” par seulement 2%.
Des risques et des opportunités pour les études
L’usage des IAG n’est pas sans risque. Des études ont montré que certaines d'entre elles renvoient des données dont la fiabilité est hautement discutable (Wu et al., 2023), contribuant ainsi à une forme de désinformation en raison du renvoi de données inappropriées ou décontextualisées (Currie, 2023). D’autres études ont relevé les biais sociaux engendrés par des données d’entraînement biaisées (Weinberger, 2020) et des phénomènes d’hallucination des IA (Khowaja et al., 2023).
Selon Haleem et al. (2023), ces technologies offrent un vaste potentiel pour stimuler les projets étudiants en tant que source d'idées, de motivation et de créativité. Si la zone de saisie sous forme de prompt initial peut conduire l’utilisateur à formuler de manière trop vague ou incomplète sa requête en langage naturel, cette zone de saisie permet dans le même temps de susciter de nouvelles interrogations, encourageant l’étudiant à appliquer ses connaissances et capacités de raisonnement (Gilson et al., 2023).
Finalement, les IAG peuvent jouer différentes fonctions dans le domaine de l'éducation : enseignant, tuteur, tutoré, pair, expert, administrateur ou encore comme outil d'apprentissage (Nickow et al. 2020 ; Hwang and Chen, 2023 ; Gouvernement, 2024). Même s’il existe de nombreuses faiblesses ou menaces liées à l'utilisation de ces formes d’intelligence artificielles en ce qui concerne la littératie informationnelle, elles comportent également de nombreuses forces et opportunités, comme le soulignent Farrokhnia et al., (2023) dans leur analyse SWOT de ChatGPT.
Questions de recherche et hypothèses
A partir de l’ensemble des éléments présentés, nous posons trois questions de recherche : (1) Tout d’abord, quels sont les outils et les ressources que les étudiants mobilisent lorsqu’ils ont la possibilité de les consulter librement en ligne lors d’une évaluation en temps limité ? (Sachant que certains enseignants interdisent l’usage des IA en cours) ; (2) Ensuite, dans quelle étape de la recherche d’information l’IAG intervient-elle dans l’usage qu’en font les étudiants ? (Bertrand Baschwitz, 2010 ; Boubée et Tricot, 2010) ; (3) Et enfin, de quelle manière et dans quelle mesure les professionnels des bibliothèques universitaires s’adaptent-ils aux nouveaux usages des étudiants° ?
A partir de ces questions de recherche, nous posons trois hypothèses : tout d’abord, nous faisons l’hypothèse (H1) que malgré la possibilité d’utiliser des AIG, les étudiants utilisent encore majoritairement et prioritairement un moteur de recherche pour compléter les ressources qui leur sont mises à disposition, grâce des requêtes en langage naturel, sans opérateurs. Nous pensons ensuite (H2) que certains étudiants utilisent des IAG pour réaliser leurs travaux de recherche documentaire. Enfin, nous faisons l’hypothèse (H3) que l’usage de ces IAG, génèrent de nouveaux questionnements et de nouveaux besoins en formation de la part des professionnels des bibliothèques universitaires.
MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE
Une étude exploratoire s’appuyant sur une approche quantitative et qualitative a été menée. L’approche qualitative s’appuie sur sept entretiens semi-directifs, menés du 05/07/2024 au 12/07/2024, auprès de professionnels choisis dans des structures de taille différente (bibliothèques universitaires ou centre de ressources documentaire), de domaines différents (travailleurs sociaux, médecine, pluridisciplinaire, informatique) et appartenant à des corps différents (conservateurs et catégories B) mais travaillant tous les sept sur des missions liées à la connaissance des publics (accueil, évaluation et enquête ou formation des usagers) : entretien n°1 du 05/07/2024 avec la responsable du centre de documentation de Ecole Supérieure Européenne de l’Intervention Sociale (ESEIS - site de Strasbourg) ; entretien n°2 du 05/07/2024 avec le conservateur BU, Services aux Publics, Direction du service et responsable du pôle évaluation et enquête de la bibliothèque universitaire de Toulouse ; entretien n°3 du 08/07/2024 avec la Responsable des collections de Philosophie / formation des usagers Bibliothèque nationale et universitaire (BNU) ; entretien n°4 du 09/07/2024 avec la responsable des acquisitions et médiatrice documentaire de la Bibliothèque de l'IUT-Pharmacie ; entretien n°5 du 9/07/2024 avec la Responsable du service transversal des Publics à l’université de Bordeaux Montaigne, entretien n°6 du 10/07/2024 avec la responsable service public et responsable adjointe à la BU de Metz, Université de Lorraine, Direction de la Documentation, BU Saulcy-Metz; entretien n°7 du 11/07/2024 avec la Responsable des collections et de la formation des usagers à la Bibliothèque Universitaire de Reims Champagne Ardenne -Bibliothèque Robert de Sorbon.
Un guide d’entretien semi-directif se compose de six questions comme le montre le tableau ci-dessous.
Tableau 1 : Questions du guide d’entretien destinées aux professionnels des bibliothèques
1 |
Comment voyez-vous aujourd’hui la place des IAG dans la recherche documentaire ? |
2 |
Avez-vous remarqué ou observé des usages de ces IAG par les étudiants ? |
3 |
Avez-vous noté des questions, des remarques, des attentes, des besoins ou des problèmes de leur part, lors ou à la suite de ces usages ? |
4 |
Comment voyez-vous la question de l'adaptation professionnelle à l'évolution de ces technologies et des pratiques qui en résultent ? |
5 |
Comment concevez-vous la question de la formation des usagers à l'emploi aussi large que possible, de ces nouvelles technologies à l'accès à l'information scientifique et technique ? |
6 |
Quelles pistes d’action possibles envisagez-vous vis-à-vis de l’IAG dans le cadre de votre charge d’enseignement aux compétences informationnelles ? |
Une analyse de contenu manuelle des propos recueillis a permis d’établir une grille thématique de l’ensemble des entretiens. Quatre entrées ont été retenues : les usages des étudiants constatés, la formation aux IAG chez les professionnels des bibliothèques, les risques de cet usage pour les étudiants et les pistes d’action de la part des gestionnaires de l’information.
L’approche quantitative s’appuie sur les résultats de l’analyse d’apprentissage autrement dit learning analytics lors d’un travail de recherche d’information en ligne, dans un cours de culture numérique, par 76 étudiants de 1ere année en BUT Information Communication issus de 3 parcours : 23 étudiants en BUT Information numérique dans les organisations le 05/04/2024, 27 étudiants en BUT Communication des organisations le 11/04/2024 et 25 étudiants en BUT Publicité le 16/04/2024.
Les learning analytics portent sur la « mesure, la collecte, l'analyse et le rapport de données sur les apprenants et leurs contextes dans le but de comprendre et d'optimiser l'apprentissage et les environnements dans lesquels il se produit » (Cherigny et al., 2020. L'objectif des learning analytics est donc d'observer le comportement de l'apprenant puis de l'analyser et de l'interpréter pour obtenir de nouvelles perspectives et fournir aux parties prenantes, enseignant, apprenant, institution, de nouveaux modèles pour améliorer l'enseignement, l'apprentissage, l'organisation efficace et la prise de décision.
Une étude examinant l'influence transformatrice de l'intelligence artificielle (IA) sur la bibliothéconomie et la science de l'information au sein des établissements d'enseignement supérieur en Inde (Senthilkumar, 2024) suggère que l’analyse de learning analytics peut être utilisée pour comprendre le comportement des utilisateurs et développer des interventions sur mesure pour soutenir la réussite scolaire.
Notre étude porte plus précisément sur l’usage des IAG par des étudiants en contexte de travail universitaire en observant notamment leurs stratégies pour rédiger les requêtes, l’évaluation des résultats obtenus depuis celles-ci et le livrable produit dans un cadre universitaire.
Pour effectuer notre recherche, nous avons cherché dans les communautés EIAH et IHM, des outils proposant des fonctionnalités de learning analytics. Nous avons trouvé quelques outils implémentés par exemple dans Moodle mais qui ne font capturer que ce qui se passe à l’intérieur de l’environnement, pas à l’extérieur. Or il était important pour nous de capturer tout ce qui se passe sur le poste informatique de l’apprenant. En effet, chaque étudiant pouvait utiliser plusieurs onglets dans un même navigateur, voire plusieurs navigateurs, tout en utilisant aussi plusieurs traitements de texte comme Word et Google doc ou des lecteurs PDF. A défaut de pouvoir trouver un outil fonctionnel de learning analytics, nous avons conçu et développé un logiciel EduWork, permettant de capturer l’ensemble des traces de l’utilisateur sur le poste informatique fixe de la salle de cours. Ce logiciel reprend la technologie implémentée et testée dans un autre logiciel de capture de traces que nous avons développé pour d’autres recherches (Zeller et Mohib, 2019 ; Zeller et Marquet, 2020 ; Zeller et Marquet, 2021) : Docyrus.
Lors de la séance conclusive du cours de culture numérique, après avoir téléchargé un logiciel EduWork sur les ordinateurs de la salle de cours, les étudiants avaient pour consigne de construire une synthèse du module « Culture numérique » en répondant à la problématique suivante : « En quoi le numérique constitue-t-il un des leviers de la transformation sociale° ? Pour répondre à cette question, les étudiants devaient s’appuyer sur les domaines étudiés en cours (histoire d’Internet, histoire du web, TIC et société, économie du web, publicité en ligne, cybersécurité, numérique et écologie). Ils avaient le droit d’utiliser toutes les ressources et les outils disponibles en ligne qu’ils souhaitaient sans limitation.
Du point de vue éthique, la capture de traces a été effectuée de manière transparente lors de la réalisation de l’activité par l’utilisateur. Les fichiers de trace, cryptés, devaient être envoyés manuellement par chaque étudiant sur un serveur en ligne avec la possibilité pour eux, de refuser au dernier moment, l’envoi de leurs learning analytics sur le serveur.
IAG ET RECHERCHE DOCUMENTAIRE
Perspectives des étudiants dans le cadre d’une recherche documentaire
Des études (Aithal et Aithal, 2023 ; Tajik et Tajik, 2023 ; Verma, 2023) ont montré que les IAG telles que ChatGPT peuvent être des outils utiles pour l’éducation, et pour des institutions telles que les bibliothèques universitaires, en aidant les usagers, dans le cadre d’une recherche documentaire, à identifier et à collecter des articles, des études, des citations ou des références bibliographiques sur un sujet particulier. Les recherches effectuées avec ce type d’IA s’effectuent à partir de requêtes rédigées en langage naturel à l’aide de mots-clés ou de phrases. Dans notre recherche nous avons voulu observer dans quelle mesure les étudiants mobilisent en cours, ces technologies pour réaliser leurs travaux.
A partir de l’analyse des données des learning analytics que nous avons collectées et analysées, nos résultats montrent que la quasi-totalité des étudiants observés effectuent d’abord des recherches avec le moteur de recherche Google (98,68%) pour réaliser leur travail. Pour autant et selon la discipline dans laquelle ils sont inscrits, les étudiants utilisent aussi des IAG, de manière assez contrastée. Ainsi la moitié des étudiants inscrits en INO (52,17%) et COM (40,7%) ont utilisé ce type d’IA, contrairement aux étudiants inscrits en PUB où une seule personne a utilisé cette technologie.
Les IAG qui ont été utilisées sont respectivement ChatGPT, Hugging chat, Perplexity, paraphraz.it de même qu’un détecteur d’IAG lui-même basé sur cette technologie. Les autres outils ou ressources utilisés par les étudiants de notre étude sont Google, Google Doc, Cairn, APA Aide, PDF files, Vidéo, les catalogues des Bibliothèques universitaires, Zotero et Amazon livres.
Ces résultats rejoignent ceux d’une étude (Zulfa et al., 2023) portant sur l'utilisation de l'informatique et des outils technologiques dans le développement des compétences des étudiants en matière d'écriture académique en anglais et qui montre que ChatGPT est utilisé pour rechercher des références bibliographiques et que dans cette finalité, le recours à l’IAG est perçu par les étudiants comme étant plus efficace. Une autre étude (Li, 2023) se basant sur la théorie de l'action raisonnée (TRA) développée par Fishbein et Ajzen (1975), et s’appuyant sur le modèle TAM d’acceptation des technologies (Davis, 1989) montre que la perception de facilité d’utilisation des étudiants à l'égard des systèmes basés sur l'IA a un impact significatif et positif sur l'utilité perçue et sur la prédiction d’usage.
Cependant, une étude conduite auprès d'étudiants sur leur perception des IAG (Amoozadeh et al., 2024) montre de la part de près de la moitié des participants, un problème de confiance dans les capacités où les résultats produits par cette technologie, en soulignant la nécessité d'une supervision humaine et d'une approbation des réponses générées par l'IA. Selon les répondants, ce manque de confiance découle des biais, des erreurs et des limites des algorithmes de l'IA. Dans cette étude, seulement un quart des personnes interrogées considèrent que l'IAG comme généralement utile. Pour autant, les résultats d’une autre étude (Sumakul et al., 2022) montrent des perceptions positives de la part des étudiants quant à l'utilisation de ce type de technologie, mais dans un cours d'écriture. Les étudiants de cette étude ont déclaré que l'IA utilisée pouvait les aider à comprendre les concepts théoriques, les assister pendant le processus d'écriture et les aider à apprendre les éléments de grammaire et de vocabulaire.
Une enquête du SCD de l’université de Bordeaux (N=4000 et dont une majorité en licence) a par ailleurs révélé que les étudiants sont près de la moitié à utiliser des IAG à côté des podcasts et de la vidéo dont ils sont très friands [entretien 5] comme le montre le graphique ci-dessous.
Figure 2 : Enquête 2024 du SCD de l’université de Bordeaux auprès des étudiants. N=4000
Dans notre étude, nous avons relevé que les étudiants utilisateurs d’IAG ont d’abord utilisé les ressources qui leur étaient mises à disposition sous forme de fichiers PDF hébergés sur Moodle. Mais au bout d’une période comprise entre 24 et 50 minutes, ils ont finalement commencé à utiliser des IAG suite à de nombreuses utilisations des moteurs de recherche, qui soit, ne renvoyaient pas les informations recherchées, soit renvoyaient une quantité trop importante de ressources à étudier. D’où le recours de leur part à des IAG pour éviter les effets de l’infobésité et parvenir à des résultats plus synthétiques et plus immédiats.
Figure 2 : Outils et ressources utilisés par les 76 étudiants en 1ere année de
BUT Information Communication
Nous avons cherché à savoir si l'utilisation, ou non, d’intelligences artificielles par les étudiants comme les IAG, à des fins informationnelles, pouvait influer la note obtenue. Nous avons donc considéré l’ensemble des étudiants comme un groupe et avons utilisé comme facteur, la variable AI_Use (Utilisation d’IA), à deux modalités (Yes/No). Un test de Kruskal-Wallis montre qu’il n’existe pas de différence significative (H2 = 1.282, p = 0.991) entre les deux modalités de la variable Utilisation d’IA, dans la note obtenue. Autrement dit, les étudiants qui ont utilisé des IAG n’ont pas obtenu de meilleures notes que ceux qui ne les ont pas utilisées.
Toutefois, ces résultats sont à rapprocher des résultats de deux études qui parviennent à des conclusions différentes. La première étude (Wu et Yu, 2024) a été effectuée depuis une méta-analyse de 24 études examinant les effets des chatbots d'IA sur les résultats d'apprentissage des étudiants et les effets modérateurs des niveaux d'éducation et de la durée de l'intervention. Les résultats de cette étude ont révélé un effet important et statistiquement significatif des chatbots d'IA sur les résultats d'apprentissage globaux, par exemple la motivation d'apprentissage, l'auto-efficacité d'apprentissage et l'intérêt pour l'apprentissage. La deuxième étude (McGrath et al., 2024) qui s’appuie sur une méta-analyse de 31 articles, révèle que la majorité des études sont soit de nature observationnelle, soit basées sur de petits ensembles de données, soit autodéclarées et, en tant que telles, ne peuvent pas encore être utilisées pour identifier des conclusions robustes ou des généralisations pour les enseignants-chercheurs et leurs pratiques.
Les auteurs (McGrath et al., 2024) ajoutent “qu'il est peut-être trop tôt pour répondre à la question de la valeur et de l'impact des chatbots d'IA sur l'apprentissage des étudiants et la pratique des enseignants ou pour tirer des conclusions de grande portée sur l'état des données probantes”. En effet, dans de nombreuses études, les étudiants ont été sondés. Il est permis de penser que certains d’entre eux n’ont pas révélé s’ils avaient véritablement une IA ou non, ou peuvent avoir considéré qu’une seule utilisation ne constitue pas un réel usage. Dans notre étude (n = 76), les étudiants ont été observés sur des usages capturés avec des learning analytics, usages qui peuvent rejoindre ou contredire les propos déclaratifs des étudiants lorsqu’ils sont sondés par questionnaire.
La fiabilité et l'efficacité de IAG à des fins informationnelles continuent de faire l’objet de recherches. Une étude visant à explorer le potentiel du ChatGPT en tant qu'outil de recherche documentaire en temps réel pour les revues systématiques et les systèmes d'aide à la décision clinique (Gwon et al., 2024), a relevé pour ChatGPT, que seules des 7 (0,5 %) des 1 287 études identifiées étaient directement pertinentes, tandis que Bing AI a permis de trouver 19 (40 %) études pertinentes sur 48, par rapport à la référence humaine de 24 études, suggérant ainsi que l'utilisation de ChatGPT comme outil de génération de preuves en temps réel n'est pas encore précise et réalisable.
Perspectives des professionnels des bibliothèques
Parce que la mission de “formation des usagers” représente un axe stratégique pour les SCD et qu’elle constitue l’étape finale de la chaîne documentaire intitulée diffusion (Paivandi et al., 2016), il nous a paru important de recueillir les avis des professionnels en charge d’enseigner les compétences informationnelles auprès des étudiants dans un contexte de développement des IAG. Muriel Frisch (2016) est d’avis que l’enjeu de la formation aux usagers ne consiste pas seulement à fournir une information scientifique, technique ou méthodologique dans la formation des usagers. Il s’agit aussi d’accompagner les usagers, en permettant de créer une culture documentaire et informationnelle, en développant une posture de recherche, avec des approches réflexives et novatrices. Nous avons pensé que les besoins des usagers, professionnels et étudiants, s’étaient, soit élargis, soit recentrés sur des attentes plus précises, compte-tenu du cycle de vie très court des technologies proposées qui ne cessent de s’améliorer et de se doter de nouvelles possibilités et fonctionnalités.
Les sept entretiens ne visaient pas à savoir comment l’IAG pouvait être utilisée au sein des activités des professionnels des bibliothèques, de nombreuses études réalisées ayant déjà porté sur cette thématique, mais visait plutôt à comprendre comment les professionnels des bibliothèques réagissent face à l’usage de l’IA par les étudiants dans leurs études (voir les six questions du guide d’entretien dans Méthodologie de recherche). Autrement dit, il s’agissait de voir si les professionnels avaient perçu ces nouveaux usages et comment ils adaptaient le contenu de formation aux compétences informationnelles.
Mise en marche des professionnels des bibliothèques face aux nouveaux usages liés aux IAG
Pour l’instant, les professionnels interrogés sont en phase de formation à l’IAG, ils mutualisent leurs connaissances à travers des groupes de travail (un dans le grand Est et un autre provenant de l’ADBU) et n’ont pas encore adapté le contenu de leur formation aux compétences informationnelles aux nouvelles formes d’IA susceptibles d’être mobilisées, à l’exception d’un seul professionnel qui a ajouté une brique sur l’IA à la formation doctorale [entretien 7]. Ils sont d’avis qu’il est nécessaire de “comprendre comment fonctionne cette machine pour pouvoir ensuite s'en servir dans le cadre des formations aux compétences informationnelles” [entretien 5]. Pour cela, les BU de grands établissements mènent des enquêtes qui comportent des questions sur les usages de l’IAG dans leur apprentissage et qui sont en cours de publication [entretiens 1, 2, 5, 6 et 7].
Usages des étudiants constatés par les professionnels
Parmi les professionnels des bibliothèques ou centre de documentation qui ont été interrogés, trois d'entre eux ont identifié des usages des IAG seulement chez les étudiants qui ont un mémoire à rédiger. Le professionnel de l’Ecole Supérieure Européenne de l’Intervention Sociale (ESEIS - site de Strasbourg) note une baisse de fréquentation du CRD qu’il impute à l’IAG : “J’ai surtout vu qu’il y avait moins d’étudiants qui venaient me voir” [entretien 1]. Dans l’autre cas, le professionnel a reçu le témoignage d’étudiants de Master Sciences de l'Éducation qu’il formait. Lors de la justification de la méthode utilisée pour créer leur première publication scientifique, ceux-ci ont expliqué qu'ils avaient utilisé l’IAG pour identifier la pertinence de leurs sources. Ils ont demandé à l’IAG quels sont les chercheurs qui comptent dans leur domaine [entretien 3]. Enfin, il arrive fréquemment que des professionnels de la BU de Bordeaux Montaigne reçoivent des demandes d’étudiants via le service de questions-réponses leur demandant de trouver des documents provenant de bibliographies produites par des IAG sans mentionner qu'elles proviennent d’une IA. Malheureusement ces bibliographies comportent de fausses références qui n’existent pas, faisant perdre du temps à tout le monde [entretien 5]. Le professionnel regrette de ne pas pouvoir échanger avec l’usager afin de comprendre son cheminement intellectuel et lui proposer de revenir aux fondamentaux de la recherche documentaire car selon ce professionnel “ le cheminement intellectuel, c'est ce qu'il y a de plus important dans un travail de recherche. [...] Et le fait qu'une machine le fasse à la place de l'étudiant, c'est terrible, ça sabote le travail intellectuel [...] En fait, c'est assez lent, effectivement. C'est ingrat, mais il faut passer par là pour apprendre à rédiger” [entretien 5]. En somme, les professionnels ont noté un changement de pratiques documentaires chez les étudiants qui ont un mémoire à rédiger.
Risques perçus par les professionnels et besoins identifiés
Aucun étudiant n’a posé de questions sur l’IA aux professionnels des bibliothèques à l’exception d’un professionnel à qui on a posé une question sur la détection du plagiat avec l’outil Compilatio [entretien 1].
Un des risques, qui est revenu le plus souvent, concerne le manque d’esprit critique face au contenu généré par une IA [entretien 1]. Il ressort à travers l’enquête de Bordeaux, que les étudiants ont besoin d’aide pour se structurer sur le plan intellectuel : “Ils voudraient avoir des cours plutôt sur la méthodologie, comment rédiger un projet de mémoire. En fait, ils ont besoin de méthodologie sur le rédactionnel, sur les problématisations” [entretien 5]. Les professionnels craignent que l’IA vienne “un peu court-circuiter cette rigueur intellectuelle”.
Puis la question de l’éthique a été abordée. Les professionnels de notre enquête appellent de leurs vœux que les étudiants reviennent “à des méthodologies de recherche qui soient fairplay [...] qui soient académiquement plus correctes, plus honnêtes, et véritables” [entretien 5]. Un professionnel nous fait part de son effroi à l’idée que ses usagers, qui sont des travailleurs sociaux, puissent utiliser l’IAG dans leurs pratiques professionnelles [...] ils vont faire faire les rapports de situation par une machine et après, ça va aller dans les mains des juges qui vont les faire lire par des machines. Je trouve ça assez effrayant.” [entretien 1].
Enfin, la capacité de l’IAG de fournir une réponse rapidement développée, donne l’illusion qu’il n’est pas nécessaire de se former et que “l'IA, c'est la solution à tout, et qu'on va gagner du temps” [entretien 5].
Nos résultats rejoignent ceux d’une étude conduite auprès de 450 bibliothécaires universitaires au Niger (Moustapha et Yussuf, 2023). Les résultats de cette étude indiquent que les professionnels sondés sont conscients des nombreuses façons dont l'intelligence artificielle peut être appliquée pour fournir des services. Toutefois, parmi les freins à l’adoption de ce type d’outil qui ont été relevés, l’étude souligne le manque de compétences des professionnels avant une véritable adoption nécessaire et précédant la formation des étudiants utilisateurs.
Pistes d’action envisagées par les professionnels de l’information
Parmi les pistes d’actions possibles, les professionnels proposent de dialoguer et collaborer avec les enseignants [entretien n°2, 4 et 6], de continuer à intégrer la formation aux compétences informationnelles dans les maquettes [entretien n°7], de revenir à des fondamentaux comme la formation à la méthodologie du mémoire et à l’identification de l’information juste [entretien n°5], de repenser la manière d'évaluer les étudiants [entretien n°1], et de former les étudiants pour qu’ils soient capables d’utiliser “une IA traitée comme un outil professionnel” [entretien 2]. A cet égard, l’étude Bradley (2022) revient sur le rôle actif que les bibliothécaires devraient jouer dans le développement et le déploiement des algorithmes d'IA, en veillant à ce qu'ils soient conformes aux valeurs d'inclusivité, de respect de la vie privée et de liberté intellectuelle [3]. Par ailleurs, l’étude de Moustapha et Yussuf (2023) suggère d'organiser des formations à l’IA pour les bibliothécaires afin d'améliorer leurs compétences dans l'utilisation de l'intelligence artificielle pour fournir des services aux utilisateurs tels que l’accompagnement ou la formation. En effet, dans le cadre de recherches documentaires, la question de l’alignement des fonctionnalités proposées par ces outils avec les besoins des utilisateurs est récurrente. Cette préoccupation rejoint les résultats d’une autre étude (Ayoola et al., 2023) qui souligne l'importance de la conception centrée sur l'utilisateur dans les systèmes pilotés par l'IA, en insistant sur l'importance d'aligner ces technologies sur les besoins et les préférences des utilisateurs.
Limites de l’étude
Les résultats de notre étude doivent être nuancés. La première limite est celle du double statut d’un des deux auteurs, celui de chercheur mais aussi celui de concepteur de logiciel avec risque de confusion des rôles et de biais sur les résultats produits. La deuxième limite est l’absence d’implémentation de scénario pédagogique dans Moodle, choix assumé de notre part. Des études (Garcia-Martinez et al., 2024 ; Karaman et Goksu, 2024) ont montré que l’impact de l’utilisation d’intelligences artificielles sur les résultats obtenus pouvait être corrélés avec la présence ou non d’un scénario pédagogique prévoyant l’utilisation de ces intelligences. La troisième limite, est le recours exclusif à des ordinateurs de bureau dotés d’interfaces graphiques traditionnels de type WIMP (Van Dam, 1997). Le recours à des tablettes dotés d’interface tactiles pourrait nuancer ou contredire ces résultats.
Enfin, la taille de l’échantillon (N = 76) est modeste et pourrait utilement être élargie à plusieurs centaines d’étudiants de manière à pouvoir utiliser plus facilement des tests paramétriques, sans être confrontés à des problèmes de normalité. L’évolution extrêmement rapide des usages des étudiants liés aux IAG peut rendre notre article obsolète assez rapidement.
CONCLUSION
Cette étude a exploré d’une part, les logiques et les stratégies qui orientent les choix des étudiants et d’explorer leurs pratiques liées aux IAG dans le cadre de recherche d’information et d’autre part, les avis des professionnels des bibliothèques universitaires vis-à-vis des pratiques des étudiants au regard des IAG dans leur travail universitaire.
Nos résultats montrent l’émergence de nouvelles pratiques informationnelles liées au développement des IAG chez les étudiants. La première partie de notre étude sur les usages des technologies informationnelles, réalisée auprès de 76 étudiants de 1ere année universitaire, montre que près de la totalité d’entre eux réalisent d'abord des recherches avec le moteur de recherche Google qui n’intègre pas directement de fonctionnalités d’intelligence générative. Cependant en fonction du parcours universitaire dans lequel ils sont inscrits, certains d’entre eux utilisent des IAG, de façon assez différente. Les étudiants qui utilisent l'IAG générative ont tout d'abord utilisé les ressources qui leur étaient fournies sous forme de fichiers PDF hébergés sur Moodle. Puis, après une période de 24 à 50 minutes, ils ont finalement décidé d'utiliser des IAG après avoir utilisé de nombreux moteurs de recherche qui ne permettaient pas de trouver les informations recherchées ou qui renvoient une quantité excessive de ressources à étudier. Ils utilisaient des IAG afin d'éviter l'infobésité et pour obtenir des résultats plus synthétiques et immédiats. De plus, les étudiants qui ont utilisé des IAG n’ont pas obtenu de meilleures notes que ceux qui ne les ont pas utilisées.
La deuxième partie de notre étude, qualitative et exploratoire, réalisée à partir d’entretiens menés auprès de sept professionnels des bibliothèques universitaires (Bordeaux, Metz, Reims, Strasbourg, Toulouse) a révélé que les professionnels des bibliothèques ont pris conscience de ces nouvelles pratiques informationnelles lors des moments de formation ou lorsque des étudiants réclament des documents à partir d’une bibliographie erronée, réalisée par une IAG. Ces professionnels se trouvent dans une phase de formation à l’IAG. Leur contenu de formation n’est, pour l’instant, pas encore adapté à l’émergence de l’IAG à l’exception d’un seul professionnel de notre étude. Ils ont cependant repéré plusieurs risques à travers ces nouveaux usages : le manque d’esprit critique vis-à-vis des résultats produits par l’IAG, l’absence d’honnêteté intellectuelle, l’illusion qu’il n’est pas nécessaire de se former devant la facilité de production de contenus et l’illusion de gagner du temps. Ils proposent donc comme pistes d'action de collaborer avec les enseignants-chercheurs, d’avoir leur formation aux compétences informationnelles intégrées dans les maquettes des diplômes, d’augmenter les formations à la méthodologie de mémoire et à l’identification des sources d’informations justes, de repenser les évaluations afin d’éviter l’usage de l’IA et enfin de former les étudiants aux IAG. Ces pistes d’actions devraient toutefois être opérationnalisées par la mobilisation de méthodologies éthiques et équitables et des perspectives d'autonomisation des utilisateurs des bibliothèques, permettant ainsi “d'améliorer l'accessibilité à l’information et de promouvoir l'inclusion” (Hodonu-Wusu, 2024).
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NOTES
[1] https://www.europarl.europa.eu/news/fr/press-room/20230609IPR96212/les-deputes-sont-prets-a-negocier-les-regles-pour-une-ia-sure-et-transparente
[2] https://www.compilatio.net/blog/communique-presse-enquete-ia-2023