Introduction
Pour la première fois dans l'histoire de l’humanité, l'urbanisation croissante est devenue la préoccupation humaine prioritaire sur la planète. Les populations urbaines sont en augmentation constante, plus rapide que l’évolution de l'ensemble des populations et dès 2050, plus des deux tiers des habitants de la planète seront des citadins (Girardet, 1996 ; Buhaug et al., 2013 ; Leeson, 2018). En parallèle, le nombre de personnes handicapées représente déjà une part significative de cette urbanisation. Le rapport de la Banque Mondiale intitulé : Population en situation de handicap dans le monde, affiche un chiffre qui semble extraordinairement élevé mais néanmoins réel : 1 000 000 000 de personnes seraient « handicapées » 1. S’agissant de la France, les chiffres représentant le nombre de personnes handicapées varient considérablement en fonction de la source, mais une constante demeure : les personnes en situation de handicap constituent la première minorité. Selon l’INSEE, 12 000 000 de citoyennes et citoyens disposent d’une reconnaissance administrative de taux d’invalidité, relevant d’une situation de handicap dans la vie quotidienne. On observe également le même constat en Europe et dans le monde : la commission européenne souligne dans ses travaux prospectifs l’estimation statistique des personnes en situation de handicap, qui s’élève à 80 000 000. De plus, le vieillissement des populations résulte en la perte progressive des capacités physiques d’un nombre significatif de citadins. Or, la planification urbaine a peu pris en compte ce changement démographique : un simple examen au fonctionnement ordinaire de la ville suffit à le comprendre, par exemple les feux de signalisation pour piétons ont longtemps été programmés pour permettre la traversée d’un adulte en pleine capacité de ses mouvements - mettant de fait en danger une personne à mobilité réduite qui prendra plus de temps pour traverser. Ainsi, le design des infrastructures urbaines n’a pas été pensé pour répondre aux besoins d’une population vieillissante, rendant les personnes âgées plus vulnérables en cas de catastrophe du fait des limitations que leur impose l'environnement physique. L’environnement virtuel est aussi à prendre en compte, car celui-ci reste peu accessible aux personnes âgées alors qu’il s’agit d’une source d’information non-négligeable pour se préparer et réagir en cas de crise. Enfin, les personnes âgées sont particulièrement sujettes à l’isolement social, facteur de vulnérabilité majeur qui survient souvent après la fin de l’activité professionnelle.
La tendance mondiale de l'urbanisation mais aussi le vieillissement des populations crée ainsi l'urgence de trouver des moyens plus intelligents pour gérer les défis d'accompagnement (Nam et Pardo 2011). Si les villes durables sont devenues un objectif très recherché pour le développement urbain futur, elles ne peuvent être véritablement durables qu'à condition d'intégrer les notions d'inclusivité, de résilience et d’équité. De ce fait, pour la portée de cette recherche, nous considérons aussi le concept de villes résilientes, définies comme les villes où il y a des « investissements dans le capital humain et social et la progression de la culture de résilience collective et d'une qualité de vie élevée, avec une gestion rationnelle des ressources naturelles, grâce à une gouvernance participative » (Caragliu, Del Bo et Nijkamp 2011). Les villes résilientes mettent en évidence des aspects importants de la durabilité, tels que la nécessité d'une gestion responsable des ressources, l'efficacité énergétique, et l'engagement des citoyens. Cependant, le concept de ville résiliente ne peut aider une ville pour atteindre la durabilité et l'inclusion que si elle lui permet de fonctionner dans des limites établies bien en amont. Compte tenu de la compréhension actuelle du concept de ville résiliente, on ne sait pas si elle possède les caractéristiques nécessaires pour veiller à ce que le développement durable et l'inclusion puissent se produire.
L’efficience de la résilience d'une ville est sa capacité « de résister, d'adsorber, d'accueillir et de corriger les effets d'un danger, en temps opportun et de manière efficace, notamment par la préservation et la restauration de ses structures essentielles et de ses fonctions de base ». Dans ce cadre, les stratégies et les efforts de réduction des risques en cas de catastrophe doivent (c'est une obligation des Etats ayant ratifié la CDPH)2 inclure les personnes handicapées à tous les niveaux afin de réduire leur vulnérabilité, atténuer l'impact des catastrophes et des pertes de vie, réduire les risques et renforcer la résilience en se concentrant sur les capacités des individus, des groupes et des institutions. Il est désormais reconnu que la clé dans la réduction de l'impact des catastrophes est de réduire la vulnérabilité des populations grâce à l'élaboration de programmes de Réduction Inclusive des Risques de Catastrophes (RIRC). Cependant, la résilience urbaine inclusive exige une approche transversale qui implique toutes les parties prenantes dans la conception et la mise en œuvre des politiques résilientes pour assurer l'égalité de traitement. Cette démarche s’appuie sur le paradigme du modèle social de l’inclusion des personnes en situation de handicap (Oliver, 2006; Shakespeare, 2015), traduisant les principes fondateurs de la CIDPH. Par conséquent, la création d'une culture commune en termes d'inclusion par la compréhension mutuelle des besoins (conception universelle) constitue le socle de l’action de résilience urbaine. Ainsi, la création et le partage de connaissances entre l’ensemble des catégories de population permettent l’accroissement de l’autonomie des personnes en situation de handicap et l'intégration des ressources de la collectivité. Cela implique également de créer les conditions de participation des personnes handicapées et des personnes âgées à l'élaboration des politiques publiques en tant qu'acteurs à part entière. Le développement d’un réseau d’acteurs « parties prenantes » qui facilitent les activités plus efficaces de prévention, de protection, d'atténuation, d'intervention et de rétablissement, doit-être le garant pour le respect des règles du modèle social ((Blanck, 1995; Wisner, 2002; Hemingway & Priestley, 2006, 2007; Kailes & Enders, 2007; Christensen et al., 2007; Twigg, 2013; Martin, 2015 ; Phibbs et al., 2015). Les parties prenantes devront veiller à l’accessibilité de l'infrastructure à toute la population, sans recourir dans la mesure du possible à des adaptations spécialisées. Pour cela, le concept du design universel est idéal car il se base sur des modèles incluant en amont les spécificités liées aux typologies de déficiences.
Les villes résilientes sont très complexes et interdépendantes, car elles sont construites à partir de grands systèmes interconnectés. Leur étude nécessiterait donc une approche qui fonctionne bien dans la complexité. C'est le cas de l'approche par l'inclusion et les Disability Studies à la lumière de l'Agenda 22 et de la Convention des Nations Unies sur les droits des Personnes Handicapées. Dans ce cadre, plusieurs universités en Europe (Bristol « resilience city » London « inclusive cities »), aux États-Unis (Berkeley « resilience and solidarity »), expérimentent des projets intégrant des sciences de l’ingénieur et des sciences humaines. S’agissant de la participation, le fait que la ville résiliente puisse être porteuse d'un nouveau partage des pouvoirs entre les acteurs est, à ce jour, beaucoup moins étudié, et pourtant il est essentiel de l'intégrer dans les nouvelles stratégies que les villes mettent en place au nom de la « ville résiliente ».
Enjeux épistémologiques
Lorsque l'on aborde la question de l’inclusion dans le cadre du concept de la ville résiliente, les réponses divergent fondamentalement selon le choix des pays en matière de modèle de société : d’un côté le modèle médical, de l’autre le modèle social. Selon le modèle adopté, le projet de la ville résiliente change d’orientation en termes de choix de société. Par voie de conséquence, le statut de la personne en situation de handicap diffère de « la citoyenneté active, à la citoyenneté passive ». Autrement dit : le modèle médical du handicap produit une citoyenneté à géométrie variable, alors que le modèle social tend vers la pleine citoyenneté.
Depuis trois décennies, les travaux issues des Disability Studies (Winter, 2003 ; Longmore, 2003) soulignent que : « le paradigme du modèle médical définie un périmètre où l’ambiguïté entre « handicap » et maladie domine. De ce fait la conception médicale du « handicap » est restée figée à l’aune de la guérison improbable (Diderot, 1749). Le 21ème siècle impose une vision du « handicap » plus rationnelle, se détachant de la maladie et cherchant à affirmer l’égalité des droits et à accroître la compensation technique et humaine. S’agissant de la responsabilité des acteurs politiques et administratifs, le modèle médical du handicap ne permet pas une approche efficiente pour développer l’inclusion transversale équilibrée et homogène. En revanche, le modèle social se détermine sur les principes fondamentaux de la citoyenneté : l’égalité des droits et des chances ; le respect de la dignité ; la non-discrimination ; l’inclusion au sein de l’environnement de proximité. Le modèle social du handicap semble donc disposer de tous les leviers pour le développement de la résilience urbaine inclusive. L'inclusion étant, peut-être, « le facteur le plus important pour garantir la durabilité et la résilience des systèmes urbains » (Klein et al., 2016). Ceci implique que tous les membres de la population ; et particulièrement les minorités, soient encouragées à participer dans la définition de la vie urbaine et du développement. L’inclusion dans la société pour les personnes handicapées est d’abord la place qui leur est faite dans la vie de la cité, dans les politiques publiques, dans les décisions de politique locale qui les concernent : leur « participation pleine et entière à la vie de la Cité », leur place dans les Conseils Municipaux, le respect de leurs droits fondamentaux, de leurs droits civiques et de leurs droits sociaux. Le modèle social du handicap peut être résumé au changement de paradigme posant la faute du handicap non plus sur l'individu et sa caractéristique physique, sensorielle ou psychique, mais sur les agencements politiques, économiques et sociaux d'une société négligeant certains de ses membres, limitant leur accès à la cité et les reléguant de facto à une position de sous-citoyen. En outre, afin d’accroître l’accessibilité de la société dans sa pluralité, les principes de la « conception universelle » permettent d’effectivement intégrer les capacités de chacun dans le design du bâti et des services, sans y apposer le stigmate de la différence (Mace, 1991 ; Barnes, 2011).
Chez la plupart de nos pays voisins de l'Union européenne et des pays avancés dans le monde, le concept de « vie en milieu ordinaire » (le plus souvent réduit chez nous à la dimension du « vivre à domicile ») s’exprime sous le double concept de « independent living » (vie autonome) et de « community living » (vie au sein de la communauté locale), c’est-à-dire inclusion dans des réseaux multiples de relations sociale, économique et culturelle. D'ailleurs, les systèmes urbains et les pays construits sur la base de l'égalité et l'inclusion montrent de manière consistante une meilleure qualité de vie, de revenus et de résilience. Tel est le cas des pays nordiques et particulièrement de la Suède, pays où l'Agenda 22 a été depuis deux décennies la démarche prospective pour les villes qui ont choisi la politique d’inclusion. En effet, afin d’impulser une politique transversale et inclusive, les municipalités et les associations suédoises de personnes handicapées ont élaboré un modèle connu sous le nom d'Agenda 22, basé sur une résolution de l'ONU adoptée le 20 décembre 1993 : Les Règles Standard pour l'égalisation des droits des personnes en situation de handicap. Ces Règles Standard ne constituent pas une obligation légale qui s'imposerait aux Etats membres, il s'agit plutôt d'une déclaration de principes. Si la résolution de l'ONU s'adresse aux États, l'Agenda 22 est présenté comme une approche holistique en matière d’action politique locale. Il développe chacune de ces règles sous forme de questions. L'Agenda 22, comme les Règles Standard, se fonde sur les Droits Humains, et notamment sur celui de l'égalité des chances impliquant des actions compensatoires : « Les personnes handicapées requièrent parfois plus d’action de la part de la communauté afin de bénéficier des mêmes conditions de vie que les autres citoyens. Dans le cadre de l’agenda 22, ces actions ne peuvent en aucun cas être considérées comme un privilège : elles relèvent des Droits de l'Homme ». Ces principes ont été inclus aussi dans la Convention des Nations Unies sur les Droits des Personnes Handicapées de 2006.
D'autre part, l'esprit inclusif du texte de la Convention internationale des droits des personnes handicapées envisage évidemment la prise en compte des personnes âgées et il faut rappeler que les termes de « Not Yet Disabled » et « Temporary Able Bodied », devenus courants dans les Disability Studies, renvoient à l'accroissement de la possibilité de se retrouver en situation de handicap ou à mobilité réduite en raison du vieillissement (National Organization on Disability, 1998). Selon l'INSEE le nombre de personnes de 60 ans ou plus a crû de 23,4 % en dix ans et leur part dans l'ensemble de la population française (23,8 %) est presque équivalente à celle des jeunes de moins de 20 ans (24,7 %), cependant la question de leurs difficultés de déplacement et de leur inclusion en cas de désastre a été très peu abordée du point de vue de la résilience alors même que, comme le signale l'étude « Mobilité des seniors en France » Laboratoire de la Mobilité Inclusive (2014), il s'agit d'un enjeu social et sociétal majeur, car le risque d'isolement et de paupérisation des aînés les rend encore plus vulnérables en cas de désastre.
Plusieurs approches sont connues pour répondre aux défis posés par le vieillissement de la population et l’augmentation croissante des risques, notamment climatiques. Par exemple, le design universel permet de conceptualiser l’environnement urbain afin de le rendre accessible pour tous, quelles que soient les capacités physiques d’un individu. De fait, l’autonomie des personnes âgées se trouve renforcée. En outre, les innovations technologiques répondant aux exigences du design universel sont autant d’outils stratégiques augmentant l'indépendance et l’accès à l’information des personnes âgées. Rien qu’en adoptant ces quelques mesures, la résilience des plus de 65 ans est accrue : si une catastrophe frappe, les individus pourront se déplacer, s’informer et se connecter à d’autres. Ces principes ont été développés par les chercheurs de la Cambridge University et de l’OCDE. Concernant l’isolement social, la Global Facility for Disaster Reduction and Recovery (GFDRR) a mené une expérience au Japon appelée “Ibasho Café”. L’objectif était d’augmenter le capital social des personnes âgées, afin d’accroître leurs leviers d’action en cas de crise. Pour ce faire, le “Ibasho Café” consiste en un lieu informel géré par les personnes âgées du quartier où l’on invite tous les résidents de la communauté à se retrouver quand ils le souhaitent. Les personnes âgées sont ainsi valorisées pour leur expérience et leur engagement dans le projet. Au lieu d’être perçues comme des individus impotents que l’on doit aider, les personnes âgées deviennent les piliers de la communauté. Cette expérience très prometteuse ouvre la porte à des politiques publiques améliorant le quotidien des personnes âgées et, de fait, leur capacité de résilience.
Or, même si le concept de ville résiliente est une méthode innovante et avant-gardiste dans son approche de planification urbaine, il ne permet pas nécessairement ou automatiquement aux villes de se développer de manière inclusive. Nous cherchons à déterminer si ce concept, de plus en plus commun, peut vraiment être appliqué comme une approche pour rendre les villes inclusives
Cas d’études : San Francisco, Tokyo, Londres
Afin d’évaluer la capacité d’inclusion des stratégies de résilience urbaine actuellement mises en place par des villes considérées comme particulièrement à risque et avancées en termes de résilience, nous avons sélectionné les trois villes suivantes : San Francisco, Tokyo et Londres. Les études de cas ont été homogénéisés, malgré les différences culturelles et politiques des trois villes, grâce à l’utilisation d’une grille analytique s’inspirant de la littérature sur la résilience et sur le handicap, notamment en considérant l’approche du modèle social (tableau 1) (Blaikie et al., 1994; Blanck, 1995; Wisner, 2002; Cutter et al., 2003; Hemingway & Priestley, 2006, 2007; Kailes & Enders, 2007; Christensen et al., 2007; Pelling, 2012; Twigg, 2013; Phibbs et al., 2015; Stough & Kang, 2015).
Tableau 1 : Grille analytique de la résilience inclusive |
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1) Socio-démographie |
Que signifient “handicap” et “personne handicapée” pour le gouvernement local ? Est-ce que la ville comprend que les handicaps sont pluriels, parfois invisibles et n’impliquent pas forcément une dépendance médicale ? Quelles sont les données démographiques connues quant à la population handicapée de la ville ? |
2) Cadre juridique |
Existe-t-il un cadre juridique spécifique garantissant les droits des personnes handicapées ? Que dit-il en termes d'égalité et de dignité ? Quels sont les mécanismes juridiques prévus pour assurer l'application de leurs droits ? |
3) Contexte politique |
La ligne politique globale du gouvernement local inclut-elle explicitement les personnes handicapées et leur inclusion ? Quelles sont les principales politiques mises en œuvre à l’égard des personnes handicapées ? Quelle est leur relation avec la ligne politique globale ? |
4) Allocation des ressources |
Comment le gouvernement local organise-t-il l’allocation des ressources pour les politiques en faveur des personnes handicapées : est-ce un budget algorithmique ou budget spécifique ? |
5) Parties prenantes |
Quels types de parties prenantes sont impliquées dans les politiques de résilience ? Existe-t-il des organisations non gouvernementales et/ou des acteurs institutionnels liés aux personnes handicapées ? Existe-t-il un processus itératif et collaboratif avec les organisations de personnes handicapées dans le processus d’élaboration des politiques ? |
Avant la crise |
Conditions préalables : Existe-t-il des politiques permettant l’accès aux ressources économiques et au capital social pour les personnes handicapées ? Existe-t-il des politiques pour assurer l'accessibilité de l'environnement bâti pour les personnes handicapées ? Si oui, suivent-ils les principes de conception universelle ? Préparation à la crise : Existe-t-il des initiatives pour localiser les personnes handicapées et leurs besoins spécifiques ? Existe-t-il des exercices pour préparer les personnes handicapées en cas de crise ? Les professionnels des urgences sont-ils formés pour traiter des personnes en situation de handicap ? Existe-t-il des initiatives au niveau des quartiers pour sensibiliser les habitants vis-à-vis des besoins de leurs voisins handicapés ? |
7) Pendant la crise |
C-MIST : Existe-t-il des initiatives et des politiques pour répondre aux cinq besoins fonctionnels du cadre C-MIST pendant la crise ? Pour être plus précis, y a-t-il des politiques assurant les besoins de communication, les besoins médicaux potentiels, les besoins de supervision et de transport des personnes handicapées au cours de la crise ? Plus important encore, existe-t-il des politiques pour maintenir l'indépendance fonctionnelle des personnes handicapées pendant la crise ? |
8) Après la crise |
Apprentissage : Existe-t-il des initiatives de collaboration avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent pour améliorer la stratégie de résilience à la lumière de la crise vécue ? Reconstruction : Existe-t-il des politiques pour reconstruire l’environnement bâti potentiellement endommagé sur les principes de conception universelle, afin de renforcer l’accessibilité ? Récupération : Existe-t-il des initiatives pour protéger et accueillir les personnes en situation de handicap pendant la phase de récupération ? |
San Francisco
Dans les années 1970, l’American Coalition of Citizens with Disabilities (ACCD), un groupe national de défense des droits des personnes handicapées, voit le jour. Le 4 avril 1977, l’ACCD organisa des manifestations aux États-Unis pour forcer le gouvernement nouvellement élu à adopter les règlements de l’article 504, afin d’entériner l’obligation d’accessibilité pour les bâtiments publics et les administrations publiques. Le 5 avril de la même année, les militants de San Francisco ont été les premiers du pays à occuper le bâtiment du département de la santé, de l'éducation et du bien-être social de la ville. Soutenus par la communauté et les organisations de défense des droits civils, ils ne sont pas sortis du bâtiment jusqu’à la signature de la section 504 le 28 avril. Cet événement historique a montré que les personnes handicapées étaient capables de s'organiser et de lutter efficacement pour leurs droits fondamentaux (Pfeiffer, 1993). Il s’agit également du début d’un puissant mouvement militant prônant la pleine intégration des personnes handicapées dans la cité (Shakespeare, 1993), et qui a conduit à l’Americans with Disabilities Act de 1990, une législation très complète garantissant l’égalité des droits aux citoyens handicapés (Pfeiffer, 1993). L’héritage de ce moment historique est encore vivant aujourd’hui, puisque quinze organisations de personnes handicapées travaillent en étroite collaboration avec la Ville et le Comté de San Francisco pour assurer l’accessibilité, la dignité et l’inclusion des San franciscains handicapés. En outre, le gouvernement local a créé en 1998 le Mayor’s Office on Disability. Le rôle de ce bureau est de superviser les politiques de la ville afin de garantir le respect de l’ADA. Par conséquent, suite à l’application de la grille analytique de la résilience inclusive, il est apparu que la cohérence entre le cadre juridique national axé sur un modèle social du handicap et le cadre politique et organisationnel (notamment la présence de parties-prenantes sur le thème des handicaps) de San Francisco a permis l’inclusion effective des personnes handicapées dans la stratégie de résilience.
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Initiatives |
Exemples |
Avant la crise |
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Nutrition Services for Seniors and Adults with Disabilities, Independent Living Resource Center of San Francisco, Neighborhood Emergency Response Teams, ADA Transition Plan...
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Pendant la crise |
Intégration complète du modèle C-MIST, des mesures sont prévues pour répondre à chaque besoin en cas de crise. |
Disability Access Coordinator, San Francisco Emergency Response Plan... |
Après la crise |
Pas de politique spécifique pour l'après crise s'adressant aux personnes handicapées, mais les arrangements actuels peuvent assurer l'inclusion de leurs besoins dans les processus d'apprentissage, de reconstruction et de récupération. |
Disability Access Coordinator, mise en accessibilité des refuges d’urgence… |
Tokyo
Après la Seconde Guerre mondiale, le Japon s’est doté d’un système de protection sociale étendue. Il en résulta la création de nombreux centres médicaux dits spécialisés pour les personnes handicapées. Séparées du reste de la société, les personnes en situation de handicap étaient fréquemment victimes d'abus physiques et mentaux au sein de ces centres, sans aucun droit pour les soutenir. Pour protester contre cette situation inhumaine, les résidents d’un centre tokyoïte entamèrent une grève de la faim en 1970, qui attira l’attention des médias. Puis, des sit-ins furent organisés devant la mairie de Tokyo, avec le soutien des militants étudiants et syndicaux. Le mouvement a duré au total un an et il a ouvert la voie à l’adoption du modèle social du handicap par les groupes militants. Dès les années 1980, les activistes ont commencé à s’organiser pour vivre indépendamment, hors des institutions. Venant tout droit des États-Unis, le premier “Independent Living Center” a été fondé dans la banlieue de Tokyo en 1986 (Hayashi et al., 2001). Aujourd’hui, les organisations de personnes handicapées sont un poids majeur dans la lutte pour l’inclusion : en 2009, ces organisations militantes ont réussi à repousser la ratification de la Convention relative aux Droits des personnes handicapées par le Japon, afin de s'assurer que le gouvernement adoptait des mesures concrètes et non pas cosmétiques (Osamu, 2013). La ratification s’est faite en 2014, 5 ans après la date initiale, et a donné la révision de la loi “Basic Act for Persons with Disabilities” qui datait de 1970. Cette ratification a été pas majeur vers les principes du modèle social du handicap, grâce à la pression internationale des Nations Unies et à celle des militants locaux. La Ville de Tokyo, quant à elle, a fait des efforts importants pour s’adapter au récent changement législatif. Par exemple, la mise en accessibilité de la ville est devenue une priorité, accélérée par la perspective des Jeux Olympiques de 2020. Cependant, si Tokyo est légalement obligée de concevoir des politiques inclusives à l’égard des personnes handicapées, les données sur l’implémentation concrète de telles mesures n’ont pas été communiquées. De plus, la Ville ne possède pas d’organes spécifiques assurant l’inclusion et le respect de la citoyenneté des personnes handicapées lors de la conception des politiques publiques. Ainsi, bien que la Ville se soit dotée en théorie de mesures améliorant la résilience des personnes vulnérables, le caractère récent du cadre législatif inspiré par le modèle social rend les politiques de résilience incomplètes face au réel enjeu d’inclusion des citoyens handicapés.
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Initiatives |
Exemples |
Avant la crise |
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Tokyo Metropolitan Plan for Persons with Disabilities and the Tokyo Metropolitan Welfare Plan for Persons with Disabilities, Tokyo 2020 Accessibility Guidelines... |
Pendant la crise |
Aucune politique trouvée liée au modèle C-MIST, uniquement des recommandations adressant les besoins de communication et de transport. |
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Après la crise |
La stratégie d’après-crise se base sur l’évaluation des besoins économiques et du support matériel nécessités par chaque résident, cependant il n’y est pas fait mention des personnes en situation de handicap. |
Disaster Victim Certificate...
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Londres
Le Royaume-Uni a une longue histoire d'activisme en faveur des personnes handicapées. Dès 1971, l’activiste Paul Hunt écrit une lettre ouverte au célèbre journal The Guardian, marquant la création de l’Union of Physically Impaired Against Segregation (UPIAS). Inspiré par l'idéologie marxiste, l’UPIAS s’est démarquée par sa critique féroce à l’égard des barrières sociales handicapant les citoyens ayant une “déficience”. Auparavant, le modèle médical du handicap plaçait la responsabilité du handicap sur l’individu lui-même, qui serait victime d’une “malchance personnelle”. L’UPIAS renverse ce paradigme, tenant la société pour responsable des situations de handicap du fait de son manque de considération envers les besoins des personnes dites handicapées.
“In our view, it is society which disables physically impaired people. Disability is something imposed on top of our impairments, by the way we are unnecessarily isolated and excluded from full participation in society. Disabled people are therefore an oppressed group in society.” (UPIAS, 1975)
Le premier chercheur universitaire britannique spécialisé sur le handicap, Mike Oliver, a rejoint l’UPIAS peu de temps après sa création. Il est à l’origine du « modèle social du handicap » dans sa conception théorique, qui est maintenant le point central des mouvements activistes à l’international (Shakespeare, 2010). Dix ans après la formation de l’UPIAS, les organisations britanniques de personnes handicapées se réunirent au sein d’un conseil appelé British Council of Organizations of Disabled People (BCODP), afin de porter leurs revendications au niveau national. Dans les années 90, des manifestations et des actions non-violentes de la part des militants handicapés sont de plus en plus fréquentes, notamment à Londres. En 1991, le BCODP a publié un ouvrage de recherche documentant les discriminations auxquelles sont confrontées les personnes handicapées dans leur vie quotidienne. Les chiffres mis en avant par le rapport étaient basés sur des statistiques produites en amont par l’Etat, ainsi les décideurs politiques ne pouvaient pas nier les situations discriminantes vécues par les citoyens handicapés. En réponse à ce rapport, le Disability Discrimination Act fut adopté en 1995 (Oliver, 2016), remplacé en 2010 par le Equality Act 2010. L’histoire des mouvements sociaux en faveur des droits des personnes handicapées a marqué la ville de Londres, qui accueille encore aujourd’hui de nombreuses organisations militantes comme Inclusion London. L’équipe mayorale elle-même a pleinement intégré le cadrage du handicap demandé par les activistes, c’est-à-dire le modèle social, allant plus loin que la définition du handicap donnée par le Equality Act 2010. Cependant, si le discours de la Ville se veut inclusif, les actions mises en place ne se détachent pas des politiques nationales : le gouvernement local est plus un relai des programmes d’aides aux personnes handicapées plutôt qu’une force de proposition. En parallèle, les organisations de personnes handicapées jouent un rôle extrêmement important de par les initiatives qu’elles mettent en place afin d’accroître l’accès aux ressources économiques et sociales pour les Londoniens handicapés. Pour finir, la stratégie de résilience de Londres est globalement très complète, mais le volet inclusion n’y est que peu abordé. Les actions nationales et celles des organisations de personnes handicapées locales sont donc contrastées par le manque d’engagement frontal de la ville avec les questions du handicap dans le cadre de la résilience urbaine.
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Initiatives |
Exemples |
Avant la crise |
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Personal Independence Payment, Access To Work, Care and support specialized housing, Inclusion London, London Prepared.... |
Pendant la crise |
Nombreux plans d’urgence en cas de crise, mais aucune indication sur les populations handicapées, sauf pour les modes de transport. |
London Mass Evacuation Framework, London Mass Shelter Framework, London Mass Casualty Framework, London Emergency Services, Liaison Panel Manual... |
Après la crise |
Un plan très complet sur les mesures à mettre en oeuvre durant la période d’après crise, mais aucune mention aux personnes handicapées. |
London Recovery Management Protocol...
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Résultats
Les trois études de cas sur San Francisco, Londres et Tokyo sont révélatrices de la difficulté pour les gouvernements locaux d’adopter une ligne politique consistante concernant l’inclusion des citoyens et citoyennes handicapés. Bien que des efforts soient menés dans chacune des villes, la démédicalisation du terme “handicap” n’est complète qu’à San Francisco, où les besoins médicaux que peuvent nécessiter certaines personnes en situation de handicap ne sont pas associés au handicap lui-même. En comparaison, Tokyo continue de percevoir ses résidents handicapés comme des individus devant être pris en charge par l’institution médicale. La Ville de Londres, quant à elle, a adopté un discours directement inspiré du modèle social, mais l’absence de dispositif concernant les vulnérabilités potentielles des personnes en situation de handicap dans les politiques de résilience exprime un décalage entre théorie et mise en pratique. A partir de ces trois villes aux cadres juridiques et culturels différents, plusieurs conclusions peuvent être tirées afin d’expliquer le degré d’inclusion des personnes handicapées dans les stratégies de résilience urbaine :
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La concordance entre le cadre juridique et les principes du modèle social est le premier indicateur d’inclusion des citoyennes et citoyens handicapés dans les politiques urbaines en général. De fait, puisque le cadre juridique relève la plupart du temps des choix de gouvernance à l’échelle nationale, l’attention ne doit pas être uniquement portée sur les gouvernements locaux. Par exemple, la Ville de Tokyo a créé un plan pour favoriser l’inclusion des personnes handicapées au sein de la communauté à cause de la récente révision de la législation nationale sur les droits des personnes handicapées, obligeant les gouvernements locaux à adopter des politiques inclusives. Par conséquent, le premier pilier pour assurer l'inclusion des personnes handicapées dans les questions urbaines sera un solide cadre juridique suivant les revendications principales du modèle social (accès complet à la citoyenneté, vie autonome, démédicalisation, vie communautaire ...), ce qui dépend le plus souvent de la gouvernance au niveau étatique et supra-étatique.
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En outre, les modifications du cadre juridique afin d’y intégrer les principes du modèle social du handicap sont les résultats de l'activisme des personnes handicapées et des pressions internationales. Les trois villes étudiées ont dû s’adapter à des changements législatifs au niveau national, découlant directement d’actions d’organisations de personnes handicapées protestant leur statut de sous-citoyens. Les organisations de personnes handicapées jouent un rôle crucial pour mettre sur l’agenda politique les problématiques liées au handicap. Elles possèdent également une expertise précieuse sur les réalités hétérogènes des citoyens handicapés et sur leurs potentielles vulnérabilités. Ainsi, créer une stratégie de résilience urbaine inclusive n’est possible qu’avec la participation des organisations de personnes handicapées lors du processus décisionnel et de la mise en oeuvre.
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Cependant, malgré l’importance des actions venant d’autres acteurs tels que les gouvernements nationaux, les organisations de personnes handicapées et les instances internationales comme l’ONU, les gouvernements locaux gardent une marge de manoeuvre cruciale pour favoriser l'inclusion des citoyennes et citoyens handicapés. En instituant un organe chargé de contrôler l'inclusion effective des personnes handicapées dans les politiques publiques, un gouvernement local peut concrètement assurer la concordance de ses politiques avec le modèle social du handicap. Par exemple, San Francisco a créé en 1998 le Mayor’s Office on Disability, dont la mission est de superviser le respect de l’Americans with Disabilities Act par les politiques locales. En conséquence, il s’agit de la seule ville étudiée qui a élaboré une stratégie de résilience complète respectant le cadre inclusif C-MIST. Inclure les questions de handicap dans la ligne politique de la ville est le meilleur moyen de garantir l’inclusion effective des personnes handicapées dans les stratégies de résilience.
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Enfin, les événements déclencheurs peuvent être utiles pour favoriser l’inclusion des personnes handicapées. Par exemple, Londres et Tokyo ont commencé à améliorer l’accessibilité de leur ville respective grâce aux Jeux Olympiques. Cependant, les événements déclencheurs ne remplacent pas un engagement politique à long terme. Ceci est d’autant plus vrai que la résilience nécessite une perspective long-termiste et un processus d'apprentissage constant. San Francisco est la seule ville sur les trois qui n’a pas accueilli un événement majeur motivant des politiques d'accessibilité. Pourtant, en affichant une politique d’inclusion basée sur les recommandations des organisations de personnes handicapées, San Francisco a réussi à produire une stratégie de résilience qui garantisse à la fois la dignité et la sécurité des citoyens handicapés, accroissant leur capacité de résilience et leur inclusion dans le fonctionnement ordinaire de la cité.
Conclusion
Nos résultats mettent en avant que des efforts ont été menés au niveau de la politique générale grâce à l'adoption de la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’ONU, les autorités locales doivent maintenant traduire les politiques d'inclusion en action.
De fait, l’objectif est d’aboutir à trois niveaux convergents de pratiques de la résilience inclusives.
1. Le protocole d’inclusion au niveau politique à destination des élus (la stratégie globale de la résilience urbaine inclusive).
Les élus locaux sont les dépositaires de la stratégie de la résilience globale. Bâtie sur une vision transversale et solidaire, cette approche détermine le choix de société que souhaitent les habitants dans leur diversité. Ainsi, les organisations professionnelles « administration, entreprises, collectifs socio », déclineront la stratégie de résilience en action sur le terrain.
2. Le protocole à l’usage des professionnels de terrain (le développement d’un schéma directeur des compétences de la résilience urbaine inclusive).
Sur le modèle de l’agenda-22 (22 recommandations de l’ONU pour l’inclusion des personnes handicapées), les professionnels de terrain recenseront les compétences afin de créer un contenu universel basé sur les critères de l’inclusion de toute la population.
3. Le protocole à l’usage des personnes handicapées et des personnes âgées. En orientant le développement des « smart cities » vers le design universel, les personnes handicapées et les personnes âgées auront des moyens plus importants à disposition en cas de crises.
Les ressources des « bigo data » intégrées aux applications de « smart city » devraient être accessibles à travers des interfaces spécialisées. À cet effet, il est important de favoriser les adaptations issues des concepts de design universel. C’est le seul moyen qui permet l’accès aux évolutions technologiques en temps réel.
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1 Rapport Mondial sur le Handicap, Organisation Mondiale de la Santé et Banque Mondiale (2011). p. 28. http://www.who.int/disabilities/world_report/2011/en/index.html ou Rapport Mondial sur le Handicap (version française) - http://whqlibdoc.who.int/publications/2012/9789240688193_fre_full.pdf
2 Cf. Art. 11 de la CDPH.