N°8 / La place de la communication interne dans le management de la performance et la compétitivité du capital humain des organisations publiques et privées

La place de la communication interne dans le management de la performance du capital humain des entreprises familiales du Grand Agadir

Abdellah Abil

Résumé

Ces dernières années, la communication interne a subi de profonds changements aussi bien sur le plan théorique que pratique. Elle s’est véritablement positionnée comme l’un des leviers du développement de la performance du capital humain de l’entreprise. Elle ne se réduit plus en de simples outils et supports de communication, inutiles et incompréhensifs.
Notre article se veut une approche qualitative de la place qu’occupe désormais la communication interne dans la performance du capital humain des entreprises familiales du Grand Agadir. Pour ce faire, nous avons mené des investigations empiriques auprès d’une trentaines de responsables et chargés de communication et ressources humaines. Nous nous sommes également appuyé sur une revue de littérature portant sur la communication et la performance et la communication et le capital humain, afin d’expliquer comment s'opère la dynamique de la communication interne et la performance du capital humain dans les entreprises familiales interrogées.

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Abstract : In recent years, internal communication has undergone profound changes in both theory and practice. It has really positioned itself as one of the levers for developing the performance of the company’s human capital. It is no longer reduced to mere, useless and incomprehensible communication tools and media.
Our article is a qualitative approach to the place that internal communication now occupies in the performance of the human capital of the family businesses of Greater Agadir. To this end, we have conducted empirical investigations with over 30 people in charge of communications and human resources. We also relied on a literature review on communication and performance and communication and human capital. in order to explain how the dynamics of internal communication and the performance of human capital in the family enterprises surveyed are working.

Keywords : internal communication, human capital performance, empirical investigations, horizontal and vertical analyses, family businesses


INTRODUCTION

La communication interne, s’est véritablement professionnalisée et a connu de profondes mutations, au cours de ces dix dernières années. Grâce à la prise de conscience des dirigeants d’entreprises, de l’importance de son rôle, lequel constitue un levier influençant positivement la motivation et l’implication du personnel dans tout projet d’entreprise. Comme le note, Bernard Miège (1996) : « … la communication est devenue en peu d'années sinon une priorité ; du moins une préoccupation première des dirigeants. Elle prend place désormais au rang des orientations stratégiques… ». Pour Christian Michon (1994) : « … l’évolution du management des organisations : « a conduit à considérer la communication interne comme une fonction à part entière puis à en faire un levier stratégique de management…». Il ajoute : « … La prise de conscience récente que la communication interne n’est plus un état naturel et spontané mais un levier de management qui influence les performances de l’organisation, conduit à intégrer la communication interne dans le management de l’organisation… ». L’entreprise se doit alors d’après Thévenet Maurice (1988) de : « … veiller à la qualité des relations et échanges entre acteurs dans l’entreprise, car cela détermine son bon fonctionnement… ». Il assigne, d’ailleurs, à la fonction communication interne quatre impératifs vus par l’auteur comme la réponse à son bon fonctionnement, à savoir :

  • L’impératif bureaucratique : c’est l’expression de la conception mécaniste de l’entreprise qui demeure et se développe à travers une multitude de supports et canaux de diffusion comme les notes de services, le journal interne, les réunions d’information ou tout simplement la transmission orale de consignes ;
  • L’impératif relationnel : c’est la volonté d’instaurer un climat de communication pour agir sur les comportements et les perceptions. Sur le plan individuel, chacun a besoin d’établir des relations, de communiquer avec l’entreprise et les autres acteurs. Sur le plan collectif, un bon climat relationnel est toujours source d’un bon climat social.
  • L’impératif symbolique : c’est la dimension qui représente la collectivité humaine et le sens de l’appartenance de chacun, l’expression du sens commun permet à l’entreprise de mieux fonctionner et à tout un chacun de faire vivre sa réalité sociale dans un creuset collectif.
  • L’impératif stratégique : c’est la représentation d’un pouvoir qui vise à diriger, à contrôler, à influencer et à maîtriser l’ensemble des stratégies individuelles ».

La communication interne est l’un des facteurs clés de la performance du capital humain de l’entreprise. Les managers le considèrent souvent comme une cible foncièrement acquise. Une erreur d’appréciation dans un contexte où l'enjeu de la performance est devenu capital. Cette dernière est désormais tributaire de l’engagement, de la cohésion d'équipes et de l'adhésion aux projets l'entreprise. Comme nous l’avons souligné la fonction communication interne est l’un des leviers de la performance à laquelle l’entreprise doit aujourd’hui, accorder plus que jamais une attention particulière. Cette dernière a déjà contribué à renforcer l'esprit d'équipe, à développer l’esprit d’appartenance à l’entreprise, et ce faisant à favoriser la performance des équipes. L’objectif de ce présent article est de montrer les répercussions d’une communication interne, mal maîtrisée, sur la performance du capital humain au sein des entreprises familiales du grand Agadir. Il s’agira de ressortir les constats, les conséquences possibles et les recommandations envisageables. Notre ambition est de faire de cette étude un cadre de référence à d'autres éventuels chercheurs en la matière, tout en ayant satisfait notre curiosité intellectuelle par la confrontation de nos connaissances théoriques aux réalités de la communication interne dans le management du capital humain des entreprises familiales. Par ailleurs, l'utilité de notre recherche demeure sans doute liée à la pertinence de nos résultats et de nos conclusions. Afin d’approcher notre sujet de recherche, nous nous sommes appuyés sur une question importante ayant guidés notre réflexion de bout à bout : face la généralisation des plateformes de communication à la démultiplication des flux d’information et à l’émergence de nouvelles modalités de travail comment caractériser le rôle de la communication interne dans le management de performance du « capital humain » des entreprises familiales?

  • Le présent article s’articule autour des axes suivants :
  • Le premier introduit le contexte de recherche et l’objectif de l’étude ;
  • Le deuxième présente la revue de littérature ;
  • Le troisième expose l'approche méthodologique ;
  • Le quatrième présente les premiers résultats, l’analyse et discussion ;
  • Enfin la conclusion annonce des pistes.

CONTEXTE DE RECHERCHE ET OBJECTIF DE L’ETUDE

L’histoire des entreprises familiales au Maroc a fait l’objet de plusieurs recherches sur leur mode de fonctionnement et gouvernance. Ces entités économiques, jouent depuis l’indépendance du Maroc, un rôle de premier plan dans le tissu économique, de l'investissement et la création d'emplois. Les grands groupes familiaux, au nombre d'une dizaine, réalisent à eux seuls 25 à 30 % du PIB et détiennent 30% de l'économie du Pays, parmi eux : 

  • L'ONA : Centrale laitière, Bimo, Cosumar, Managem, Axa Assurances, Marjane (avec Auchan), Sopriam (importateur Peugeot/Citroën), Tractafric, Brasseries du Maroc,
  • Groupe Benjelloun : BMCE, BASF, SAIDA STAR AUTO, MAGHREBAIL, SALAFIN, CFG, MAROC SOIR…),
  • Groupe Chaâbi : Holding Ynna : Dimatit, AswakAssalam, Super Cérame, Plastumar, Snep, Hôtellerie, Textile, Agroalimentaire, Bâtiment, Crédit à la consommation...,
  • Groupe Akhannouch : Afriquia, Akwa Holding, Maghreb Gaz, Maghreb Oxygène, Nouvelle Tribune, Médi Télécom
  • Groupe Agouzal : Chimicolor, Huileries de Meknes, Conserveries, Moulins, tanneries...),
  • Groupe Lamrani Karim : Foodipex, Marotrans, Smeia, SmmSocodamDavum, Crédit du Maroc, Bois de l'Atlas, Marocéan, Imm Procter &Gamble, Cema Bois,
  • Groupe Zniber : Ebertec, Celliers de Meknès, Atlas Bottling, 
  • Groupe Kettani : Wafabank et filiales, l'Economiste, Agroplus, Tisbrod, Manar,
  • Groupe BenSalahOlmarcom: Atlanta assurances, Comptoir métalurgique, Otis Maroc, Oulmes, Sanad, Smdc, Orbonor,
  • Groupe El Alami : Jacob Délace, Sn, Aluminium du Maroc, Structal, Industube, Afric Industries,
  • Groupe Amhal : Omafu, Somepi, Tissir Prima Gaz, Jorfgaz,
  • Groupe Sekkat : Intellect, 10 Rajeb, Maghreb Steel.

Les plus célèbres sont les « Akhannouch », «Aït Agouzal », «Aït Oubâakil », « Amhal » et «Aït Bicha » qui opèrent dans la pétrochimie, l’immobilier, l’agro-alimentaire, le tourisme et le transport.[10]Leurs modes de management reposent sur des règles et valeurs qui leur sont propres. Elles se caractérisent, d’après Zakaria Fahim (2016), par : « …Une forte implication de la famille généralement motivée par une autre logique qui souvent s’avère difficilement conciliable avec celle de l’entreprise et du business…». La plupart s’engagent davantage dans la modernisation des structures et la promotion des bonnes pratiques de la bonne gouvernance. La communication et la performance du capital humain y figurent aussi, au sommet des priorités des dirigeants. L'enjeu de l’efficacité étant tributaire de l’implication et de l’adhésion réelle du capital humain de l’entreprise. Au Maroc, Il y a très peu d’études sur le positionnement de la communication interne dans le mangement de la performance du capital humain au sein des entreprises familiales. L’histoire du capitalisme s’est construite, elle aussi, sur l’entreprise familiale comme modèle économique de référence (Gomez, 2001). C’est un système hybride (entreprise et famille) qui reproduit le modèle familial fondé sur l’autorité patriarcale, la légitimation par le droit de succession et par l’appartenance au groupe primaire comme mode d’adhésion. Les alliances matrimoniales constituent le socle des alliances économiques et les successions intra familles assurent leur longévité (Hirigoyen, 2009). Au Maroc, les entreprises familiales continuent d’occuper une place majeure dans le PIB du pays. Les recherches menées ont toujours été préoccupées par leurs modes opératoires et par les facteurs endogènes et exogènes qui influent sur leur management (Miller et le Breton-Miller, 2005). Les chercheurs attribuent leurs succès à leur vision générationnelle, à la solidarité familiale, à la valorisation des métiers, et à l’adaptation à l’environnement. Ces réalisations font d’elles, des entreprises pérennes. Comme le souligne (Hanine 2016) d’autres facteurs influent sur la durabilité de ces entreprises familiales comme les valeurs d’altruisme et l’ancrage dans un territoire, l’existence aussi d’interactions entre les rouages managériales et émotionnelles. Pour régis Cœurderoy et Albert lwango (2012). Le succès story n’est pas l’apanage de toutes les entreprises familiales. Un grand nombre d’entre elles disparaissent, ou s’absorbent par des entreprises plus puissantes, ou se transforment en entreprises non familiales. Quant à la place de la communication dans la performance du capital humain de ces entreprises, notons que la communication interne est ancrée dans les pratiques quotidiennes (de manière plus ou moins structurée et formalisée). Dans certaines entreprises, existent des services entiers dédiés à la communication interne. Dans d’autres, elle est positionnée comme fonction complémentaire au DRH. Nous constatons, toutefois, une plus grande présence de la place de la communication interne lors de l’adhésion du capital humain à une culture, à un projet d’entreprise ou à un changement organisationnel. Par ailleurs, nous ne disposons à l’heure actuelle que d’un seul « Baromètre de la fonction communication interne » au Maroc, réalisé entre décembre 2015 et janvier 2016, par l’Agence MACOM’IN, conjointement au cabinet INERGIE, auprès d’une cinquantaine d’entreprises marocaines. L’objectif dudit Baromètre étant d’évaluer la place qu’occupe la fonction communication interne au Maroc et d’en dresser un état des lieux : positionnement, objectifs, structure, moyens, et profil du communicateur interne. Les résultats du Baromètre font ressortir que le profil type du communicant interne marocain est plutôt féminin ; jeune avec une expérience dans une fonction commerciale. La structure type de la fonction communication interne est souvent mixte (interne et externe) rattachée au DG ou PDG. Les missions et les activités du communicant sont réparties entre les ressources humaines et la communication externe. Les objectifs de la fonction communication interne sont orientés en priorité vers la sensibilisation des collaborateurs aux enjeux de l’entreprise, aux demandes d’informations, au développement d’une culture commune et à l’écoute du corps social. Les stratégies de communication interne la culture de l’évaluation via des indicateurs de mesure (étude de lectorat, étude de climat interne, audit de communication interne,) sont encore peu formalisées dans plusieurs entreprises. Une part importante de supports numériques a pris place à côté des supports classiques de communication Les contenus sont centrés essentiellement sur les enjeux business. Au-delà de la place accordée au relationnel et à l’affichage.  Les principaux freins au développement de la communication interne demeurent : la rétention d’information, le cloisonnement, la lourdeur des circuits et le manque d’implication des managers. Pour ce qui est de l’évolution souhaitée et des défis à relever nous pouvons énumérer : la professionnalisation de la fonction communication interne, l’implication des managers, et l’adaptation au numérique, et aux médias sociaux. Pour conclure, ce premier baromètre de la fonction communication interne au Maroc,  nous a été d’une très grande utilité pour prendre la température de la fonction communication interne, et révèle que cette dernière demeure encore axée sur les besoins fondamentaux d’information et souffre d’un manque d’implication managériale.

REVUE DE LITTERATURE

Pour approfondir nos connaissances sur l’état de la communication interne au sein des entreprises étudiées, nous nous sommes également appuyés sur des lectures de base et des sources diverses en communication interne et management du capital humain. Nous tâcherons dans les pages qui suivent d’exposer l’essentiel des idées ayant guidés notre réflexion.

COMMUNICATION INTERNE ET MANAGEMENT DES ENTREPRISES

La communication demeure la base du management du capital humain d’une entreprise, explique le professeur Bernard Miège (1995) pour qui : « … la communication est devenue en peu d'années sinon une priorité ; du moins une préoccupation première des dirigeants. Elle prend place désormais au rang des orientations stratégiques… ». Un avis partagé par Bruno Henriet (1993) qui note que : « … le temps de management axé sur la production n'est plus efficace. Les décisions issues d'un processus de modélisation et de rationalité ne répondent pas toujours aux exigences de l'environnement et surtout elles ne trouvent pas ce qu'elles nécessitent d'implication de la part des exécutants. Ce faisant dans toute approche managériale il faut intégrer une autre dimension qui paraît d'une ultime importance, c'est la dimension humaine … ». Une dimension qui s’exprime davantage par le nouveau rôle la communication interne est d’après Philippe Detrie et Catherine Meslin-Broyez (2001) : « …  A pour rôle de donner du sens pour favoriser l'appropriation, donner de l'âme pour favoriser la cohésion et inciter chacun à mieux communiquer pour favoriser le travail en commun … ». Toutefois, si la communication interne est considérée, aujourd’hui, par les chercheurs en science de gestion et du management comme une fonction à part entière ;elle n’est pas toujours estimée à sa juste valeur. De plus, elle ne figure pas au sommet des priorités des dirigeants d’entreprises. Ces derniers, considèrent souvent la cible interne comme foncièrement acquise. Une erreur de jugement dont l’entreprise peut bien se passer dans un contexte où l'enjeu de la performance est devenu vital, où cette même performance est tributaire de l’engagement et de la mobilisation des collaborateurs. C’est ce qui fait dire à Michel Crozier (1994) que : « …  Si la communication interne aboutit à un résultat nul, c’est parce qu’elle est presque toujours conçue comme un moyen de faire passer des messages du sommet de la pyramide vers le bas…» Pour Philippe Detrie et Catherine Broyez (2001) : « …  Cette fonction est devenue le bouc émissaire de l'entreprise ». Pourtant, celle-ci a déjà fait ses preuves. En particulier, lorsqu’il s’agit de :

  • Favoriser la cohésion sociale,
  • Développer l’esprit d’appartenance,
  • Favoriser la performance des équipes.

En d’autres termes, la communication permet de créer des interactions et des liens au sein d'un groupe et offre au capital humain la possibilité d'améliorer la connaissance de l'entreprise, de sa stratégie et de son fonctionnement. Un capital humain bien informé des enjeux et des projets stratégiques de l’entreprise, qui comprend le sens du, la culture et les valeurs de l’entreprise, sera plus performant et épanouie ». Comme l'écrit Pierre Labasse (1994) dans l'intelligence des autres : « …  Les salariés ont une façon qui leur est propre de saisir et de comprendre le fonctionnement de l'entreprise, une façon d'en parler et de l'expliquer. Le problème est qu'elle ne coïncide pas forcément avec celle des dirigeants. Elle ne repose pas sur les mêmes concepts, elle n'a pas recours aux mêmes mots ou ne les emploie pas dans le même sens…  ». Concernant l'impact de la communication interne sur la productivité et la performance du capital humain de l’entreprise, il n'est pas toujours facile à établir. Cependant, l'absence d’une bonne communication interne peut avoir des incidents majeurs sur la performance du capital humain. Citons à ce titre, le mécontentement, la perte de confiance, le manque de cohésion, l’absentéisme. Il ne s'agit pas de rendre l’entreprise un lieu de compétition, mais une cellule à la fois compétitive et performante qui développe l'appropriation des objectifs, la cohésion, le travail en commun et la qualité de vie au travail. Philippe Detrie et Catherine Meslin-Broyezque (2001), admettent que : « … l'efficacité ne se nourrit pas exclusivement de cohérence, mais aussi de cohésion … ». Les habiletés communicationnelles, de positionnement et d’implication, de vigilance et de maillage, d’écoute organisée, d’enrichissement professionnel, et de coordination poussent désormais les entreprises à privilégier l’impératif stratégique de la fonction communication interne sur les autres impératifs recensés par Christian Michon (1994) :

  • L’impératif bureaucratique à travers le développement une multitude de supports : les notes de service, le journal interne, les réunions d’information pour le seul but est la transmission orale de consignes,
  • L’impératif relationnel visant à instaurer un climat de communication basé sur un bon climat social de travail ;
  • L’impératif symbolique, c’est et le sens de l’appartenance commun à l’entreprise,

Bernard Gaudin (2015) dans son mémoire consacré aux évolutions de la fonction communication interne, affirme vouloir : « … réinventer la communication interne à l’ère collaborative et l’intelligence collective … » challengée par la porosité croissante entre audiences internes et externes, l’explosion d’Internet et des réseaux sociaux, des nouvelles pratiques de communication, largement répandues venant bouleverser les comportements et les modes de communication interne des entreprises. L’on y voit la présence des « wikis », des blogs de dirigeants ou d’experts offrant de plus larges possibilités d’interaction. La communication interne se professionnalise et s’étoffe avec d’une part, la transition numérique et d’autre part, l’évolution des usages qu’elle implique. Quant à Claude Duterme (1999), il avance que : « …quelle se réfère de plus en plus ces dernières années à une dimension plus construite, une action volontaire au sein de l’entreprise ; la gestion de l'information et dans sa version la plus élaborée la recherche de consensus autour de la culture d'entreprise …». Pour Jean-Marie Peretti : « …l'entreprise de demain ne pourra remplir sa mission et atteindre ses objectifs que si elle améliore sa faculté à communiquer, à informer et à faire participer… ». Dans sa composante managériale, la communication interne a pour rôle d'encourager les compétences d'écoute, de faire circuler l'information, de promouvoir l'esprit de coopération. En bref, « développer le sens du collectif ». Sans une réelle communication interne, l'organisation laisse les champs libres aux rumeurs, incontrôlables et nuisibles.

COMMUNICATION ET  PERFORMANCE DU « CAPITAL HUMAIN »

Le capital humain est une théorie économique développée par Gary S. Becker (1994), principalement dans son livre « Human Capital » Selon Becker, chaque individu dispose d’un capital propre représenté par ses connaissances et compétences, qui déterminent sa productivité et sa valeur sur le marché du travail, matérialisée par les salaires qu’il peut obtenir de ses employeurs. La définition du « capital humain » de l’entreprise a toujours été un sujet de débat. Théoriciens de l’entreprise comme praticiens, ont émis des propositions mais il n’existe pas de consensus général. De façon globale et partagée, le capital humain d’une entreprise représente l’ensemble des talents individuels et collectifs d’une entreprise. Il s’agit de la qualification des collaborateurs, leurs expériences dans les métiers qu’ils exercent et leurs aptitudes à participer de manière collective aux projets de l’entreprise. La performance du « capital humain » est également tributaire par la place stratégique de la communication interne dans son développement. Il reste un actif immatériel lié étroitement à la réputation de l’entreprise, à sa culture interne, et à la qualité de sa gouvernance. Selon la définition de l’OCDE (1998, 2001), le capital humain recouvre les connaissances, les qualifications, les compétences et les autres qualités d’un individu qui favorisent le bien-être personnel, social et économique. La notion du « capital humain » a le mérite de présenter l’homme comme un actif et non comme un facteur de coûts. Elle fait écho à l’aphorisme du Jean Bodin (1576) « il n’y a ni richesse ni force que d’hommes ». De ce fait, les actifs cruciaux pour la compétitivité des entreprises sont désormais immatériels. Trois siècles après Bodin, Henri Ford parle que deux éléments importants n’apparaissant pas toujours au bilan d’une entreprise : sa réputation et ses hommes ». Toujours selon une étude de « l’OCDE », à horizon de 2030, le capital humain deviendra plus que jamais un facteur clé de croissance et de compétitivité. Le forum économique mondial de Davos publie chaque année, en collaboration avec le cabinet de conseil « RH MERCER », le classement des pays les mieux placés pour contribuer au développement de la réussite économique du monde. Le classement est effectué sur la base de l’indice du « capital humain », répartis sur quatre piliers : l’éducation, la santé, le bien-être, l’emploi et le travail. De son côté, l’INSEAD publie en partenariat avec le « Human Capital Leadership Institute de Singapour et Adecco » son « indice global de compétitivité des talents », qui mesure la compétitivité d’un pays fondée sur la base de la qualité des compétences qu’elle est à produire, d’attirer et de retenir. Dans un contexte économique défavorable, le « capital humain » est devenu alors un enjeu majeur de la performance de l’entreprise surtout dans les processus opérationnels et commerciaux. Or, si le capital humain n’est pas engagé et motivé, cela se ressent sur le rendement et la rentabilité de l’entreprise. La théorie du capital humain a été revue par deux nouvelles théories, à savoir : la théorie des capacités d’Amartya Sen (2009) et la théorie d’un courant académique, dénommé par l’acronyme RBM (Resource-Based Managemen).La théorie des capacités d’Amartya propose un élargissement de la théorie du capital humain. Elle valorise le bien-être au travail et les avantages qu’une personne peut en procurer par une remise permanente de ses capacités dans l’expérience professionnelle. Ladite remise implique une modification des représentations traditionnelles de ce qu’est la performance et la compétitivité de l’entreprise. A l’heure actuelle la rentabilité des entreprises est davantage conditionnée à la qualité de l’immatériel (prise d’initiatives, sens de la responsabilité, créativité, intégration, etc.) qu’à la quantité du matériel (ratios financiers, fonds propres, cours de Bourse, etc.). Pour la théorie du RBM (Resource-Based-Management), souligne l’impact des compétences individuelles sur la rentabilité de l’entreprise. Cette dernière dont la finalité est de l’ériger en une ressource stratégique susceptible de procurer un avantage concurrentiel déterminant. D’ailleurs, l’un des principaux fondateurs de l’approche RBM, Jay Barney rappelle que les différences de rentabilité entre les entreprises s’expliquent moins par les « équations stratégiques » que par les capacités différentielles à se doter des ressources-clés. Jay Barney a défini d’ailleurs, les cinq critères d’une ressource-clé, à savoir : la rareté, une source de valeur, non imitable, non transférable et non substituable. C’est ainsi que la notion de « pôle de compétence » se substitue progressivement à celle de « portefeuille d’activité » pour la mise en place des stratégies d’entreprises. Le pôle de compétence comprend désormais, la motivation et le bien-être du capital humain. Ce sont les interactions entre pôle de compétence et le portefeuille d’activité qui créent la valeur, le développement humain et le progrès social. C’est en effet les grands absents de la théorie du capital humain développée par Gary Becker. Dominique Méda et Patricia Vendramin (2013) dans « Réinventer le travail »[39], parlent de montée de «l’éthique de l’épanouissement» qui porte sur la réalisation de soi, et le sentiment d’utilité, plus que sur la dimension instrumentale du travail (salaire, sécurité de l’emploi, etc.). Avec l’extension du numérique, l’éthique, de l’épanouissement et la transition vers une économie de la connaissance, c’est la valorisation du capital humain qui permet la transformation du travail en performance. Dans ce présent article, notre souci se pose alors au niveau des répercussions de l’absence d’un dispositif de communication structuré et fort sur la performance du capital humain des entreprises familiales du grand Agadir, objet de notre recherche. Ce souci est d'autant plus légitime vu contexte complexe et difficile dans lequel évoluent ces entreprises, où les attentes être au cœur de cette évolution du capital humain de nos entreprises. Notre démarche essayera de faire ressortir les constats, les causes, les conséquences et les solutions envisageables. Elle repose également sur la vision qu’ont les différents acteurs des entreprises familiales étudiées, de la place de la communication interne sur la performance de leur capital humain. Il s'agira de voir s'ils perçoivent en la communication un dispositif managérial qui contribue efficacement à la performance du capital humain de l’entreprise.

METHODOLOGIE

Au regard de ces apports théoriques et dans un souci de mieux comprendre la place qu’occupe la communication interne sur la performance du capital humain des entreprises familiales ; nous avons mené des entretiens semi-dirigés individuels d’une heure auprès d’une trentaine de responsables de communications des entreprises familiales concernées : 12 responsables communications globale, 6 responsables RH et  communication interne, 6 responsables -marketing et communication globale, 6 responsables communications interne. L’approche terrain a couvert tout le territoire du Grand Agadir et cible toutes les entreprises organisées à savoir celles qui détiennent une comptabilité formelle. Elle concerne les entreprises opérant dans les secteurs de l’industrie agroalimentaire, du commerce et des services et exclut de ce champ les secteurs du tourisme, et de l’informel.  Les entreprises ciblées ont été classées selon le double critère du chiffre d’affaires et des effectifs employés par référence aux textes juridiques qui en fixent les limites dans notre pays. Ainsi dans la présente enquête, les très petites et moyennes entreprises (TPME) sont celles dont le chiffre d’affaires est inférieur à 75 millions de DH et des effectifs inférieurs à 200 employés. Les très petites entreprises (TPE) sont définies comme étant les unités ayant un CA de moins de 3 millions de DH et un effectif inférieur à 10 employés. Les grandes entreprises (GE) sont celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 75 millions de DH ou des effectifs dépassant 200 personnes. L’enquête s’est ainsi adressée à 30 entreprises familiales : 8 (GE) représentant l’agro-alimentaire, 12 (TPME) opérant dans l’industrie, 10 (TPE) représentant le commerce et 5  les services marchands non financiers. Les entretiens représentent une situation sociale complexe basée sur l'interaction entre l'intervieweur et l'interviewé plus qu'une simple extraction d'information. Ils offrent la possibilité de laisser parler les acteurs tout en opérant des réaménagements et des réadaptations, comme le précise A. Blanchet (1992) : « …le questionnaire provoque une réponse » alors que « l'entretien fait construire un discours… ». Les personnes ciblées nous ont fourni des éléments de réponse sur ce qu'elles pensaient de l’apport de la communication interne sur la performance du capital humain de leurs entreprises. Les limites de notre approche peuvent être de plusieurs ordres :

  • Les réponses passionnées, agressives, ou tendant à plaire ou à se faire remarquer ;

  • Les limites liées à la compréhension des items ;

  • Les limites liées à l'auteur lui-même.

Le découpage des entretiens semi dirigés en plusieurs thématiques nous a permet de rendre le cheminement plus intuitif possible pour le répondant. Un agencement judicieux des différents groupes de questions par thèmes à été défini dès la phase de conception de l’enquête. A l’intérieur de chaque thème, on est parti du général simple au précis compliqué. Notre choix s’est porté sur les dispositifs de communication interne utilisable dans toute approche sur le positionnement de la communication interne en management des entreprises. Nous nous sommes largement inspirés de l’excellent travail de Bruno Henriet et François Boneu (1995). Ces dispositifs sont : le dispositif de positionnement et d’implication, le dispositif de vigilance et de maillage, le dispositif d’écoute organisée, le dispositif d’enrichissement professionnel, le dispositif de coordination. Ces cinq dispositifs semblent bien constituer un paradigme et reposent sur une base épistémologique qui se veut opérationnelle qui permet d’évaluer la qualité de la communication interne dans une entreprise. Il est difficile de hiérarchiser ces dispositifs dans leur relation de cause à effet. L’on considérera plutôt ces dispositifs comme interactifs. La valeur ajoutée de ces dispositifs demeure celle de tous les dispositifs étudiés dans leur globalité. Passons à présent en revue, le sens donné aux cinq dispositifs : 

1. Le dispositif de positionnement et d’implication signifie que l’entreprise dispose d’un système d'information et d’échange cohérent et efficace. Ce dernier, permet une implication réelle du capital humain dans la vie de l’entreprise. Ledit système d’information et d’échange se caractérise par la régularité des informations communiquées quotidiennement. Le dispositif nous renseigne aussi sur les diverses possibilités mises à la disposition du capital humain pour se positionner et de s’impliquer davantage dans les projets de l’entreprise. Rappelons au passage que ces dernières années on parler beaucoup du positionnement et d’implication du capital humain dans l’entreprise petites comme grandes. Ces dernières, observent de plus en plus une volatilité de leurs collaborateurs et perte des talents qui leurs coûte cher. C’est un véritable fléau auquel doivent faire face les entreprises qui n’arrivent plus à bien fidéliser leurs talents et qui doivent prendre au sérieux de développer ce dispositif de positionnement et d’implication du capital humain l’entreprise. Ce dernier qui doit être perçu comme un véritable vecteur de la performance du capital humain et non une simple ressource qui ne génère que profit pour l’entreprise. Les dirigeants des entreprises ont intérêt aujourd’hui à promouvoir un management qui favorise l'émergence de ce sentiment d’appartenance, en donnant l'impression à leur capital humain que le travail n'est pas imposé mais plutôt guidé par une ambition qui donne du sens et de la perspective. 

2. Le dispositif  de vigilance & de maillage est l’un des dispositifs puissants pour booster la performance du capital humain d’une entreprise. Il nous renseigne sur les possibilités de prises d’initiatives individuelles offertes aux salariés de l’entreprise ainsi que du degré d’autonomie dont bénéficie chaque salarié. Pour ce faire, il est nécessaire : 

  • De faciliter le partage de l'information ;
  • De favoriser le travail en groupe ;
  • De faciliter la communication et la coopération entre le capital humain de l’entreprise.

3. Le dispositif d’écoute organisée est un puissant levier de la performance du capital humain de l’entreprise. Ce dispositif nous renseigne, sur les systèmes d’information existants, sur la pratique des enquêtes d’opinion et des audits de communication. L’accessibilité et l’actualisation des supports d’information et d’écoute organisée (newsletters internes, outils collaboratifs, l’intranet, blog interne, agenda partagé, entretiens individuels annuels), sont considérées comme d’excellentes possibilités de recueillir le ressenti du capital humain de l’entreprise. L’absence du dispositif d’écoute organisée  augmente considérablement les mauvaises conditions de travail et agit considérablement sur la performance du capital humain de l’entreprise.

4. Le dispositif « d’enrichissement professionnel des compétences » reconnaît au salarié le droit de trouver du plaisir et du sens dans les tâches qu’il a à effectuer. La « fun atwork » est l’un des moyens pour garantir au capital humain de l’entreprise, l’épanouissement professionnel souhaité et la qualité de vie au travail. Le salarié doit savoir pourquoi son travail est important et en quoi sa performance contribue à la réussite de son entreprise. La formation continue est reconnue par de nombreux spécialistes du développement du capital humain comme un des moyens privilégiés « d’enrichissement professionnel des compétences » de l’entreprise comme la décrit le sociologue R. Sainseaulieu (1995) comme : « porteuse à travers ses actions de processus transformateurs et de changement organisationnels suffisants pour que l’on puisse au nombre de voix privilégiés du développement sociales des entreprises contemporaines. Certes, dans un contexte de concurrence très forte, les entreprises doivent sans cesse accroître leur compétitivité, d’où la nécessité d’un d’enrichissement professionnel des compétences permanent du contenu du travail et de la mission du capital humain de l’entreprise.

5. Le dispositif de coordination constitue la principale clé du management de la performance du capital humain de l’entreprise. Un tel dispositif exige de l’intelligence collective et individuelle pour garantir une ambiance de travail agréable pour plus de synergies interactives. Si la coordination est basée surtout sur la quête permanente de cohérence et la recherche d’une performance collective (Henry Mintzberg, 2014) et Alfred Sloan (1963). Parmi les éléments essentiels du dispositif de coordination, on citera : la standardisation des procédés et l’ajustement mutuel. L’absence d’un tel dispositif peut engendrer un déficit de la performance du capital humain de l’entreprise qui se répercutera sur le fonctionnement de l'entreprise au quotidien. Le dispositif de coordination nous renseigne également sur la pratique et la nature de la coordination au sein de l’entreprise. S’agit-il d’une coordination de type collégiale ou divisée et autocritique?  Les salariés ont-ils les moyens de se coordonner mutuellement ? Les réunions se font-elles en fonction des problèmes à résoudre ou informel ? Venons à présent aux résultats qui ressortent de nos entretiens empiriques sur la perception de 30 entreprises interrogées quant au positionnement de la communication interne dans le management de la performance du capital humain.

LES RESULTATS 

Comme mentionné plus haut, nous nous sommes entretenus au tout début de notre expérimentation avec 12 responsables de communications, 6 responsables RH et communication interne, 6 responsables marketing et communication globale, 6 responsables communications internes. Deux thématiques ont été abordées lors de ces entretiens semi-dirigés individuels à savoir :

Thématique 1/ : Le fonctionnement de la fonction communication interne au sein des entreprises familiales

  • Structure, organisation, mission et objectif de la communication interne ;
  • Budget dédié à la communication interne ;
  • Cible de la communication interne ;
  • La perception de la fonction communication interne en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise ;
  • L’attention accordée à la fonction communication interne en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise par les dirigeants.

Thématique 2/ : le fonctionnement des dispositifs de communication interne en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise par les dirigeants ;

  • Le dispositif de positionnement et d’implication :
  • L’existence d’un système d'information et d’échange cohérent et efficace dans l’entreprise, ses caractéristiques, sa régularité ;
  • Les diverses possibilités mises à la disposition du capital humain pour se positionner et s’impliquer davantage dans les projets de l’entreprise ;
  • La volatilité des collaborateurs et la perte des talents et son impact sur la performance du capital humain de l’entreprise ;
  • Le dispositif de vigilance et de maillage :
  • Les possibilités offertes par les entreprises pour booster la performance de leur capital humain en matière de de vigilance et de maillage ;
  • Les possibilités de prises d’initiatives individuelles et du degré d’autonomie dont bénéficie le capital humain ;
  • Le dispositif d’écoute organisée :
  • Les es systèmes d’information existants en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise ;
  • La pratique des enquêtes d’opinion et des audits de communication ;
  • L’accessibilité et l’actualisation des supports d’information et d’écoute organisée (newsletters internes, outils collaboratifs, l’intranet, blog interne, agenda partagé, entretiens individuels annuels),
  • Le dispositif d’enrichissement professionnel des compétences :
  • Les moyens pour garantir l’épanouissement professionnel et la qualité de vie au travail pour capital humain de l’entreprise ;
  • La place de la formation continue en lien direct avec « l’enrichissement professionnel des compétences » du capital humain de l’entreprise ;
  • Le dispositif de coordination :
    • L’intelligence collective et individuelle en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise ;
    • La standardisation des procédés et l’ajustement mutuel de la coordination en lien avec la performance du capital humain de l’entreprise ;

Les réponses des interviewés ont été recueillies dans une approche qualitative et exprimées en effectif et non en pourcentage, de la manière suivante : Pour dresser en premier lieu le portrait du  communicant interne des entreprises interrogées, il s’avère tout d’abord que celui-ci est le plus souvent une femme, de plus de 40 ans, employé dans le secteur agro-alimentaire davantage les autres secteurs de la région. Il travaille souvent au sein d’un service communication rattaché pour la plupart des cas au DRH ou directement à la direction générale, pour une structure entre plus de 2000 salariés à 4500 salariés. 12 responsables parmi les 30 répondants de communication interne déclarent que la communication interne se structure mais elle ne figure pas encore comme l’une des priorités stratégiques de l’entreprise. M. Adil, responsable de communication dans une PME Agro-alimentaire, déclare que dans une PME : « la fonction est menacée dans des entreprises très verticales ou procédurales comme les nôtres ». Ce que confirme Mme IBTISSAM, qui exprime de la lassitude à l’égard d’un contexte où toutes les demandes sont énoncées sous le mode de l’urgence ». De son côté, Mme AMAL, responsable de communication dans une entreprise d’export/import affirme qu’elle : « ne dispose pas toujours de temps pour accompagner le capital humain de l’entreprise, notamment des cadres de proximité soumis à la pression et aux injonctions paradoxale ». D’autres responsables ne semblent pas moins lucides ni résignés quant aux écueils et embûches qui viennent entraver quotidiennement leur action et leur efficacité au quotidien. Ils évoquent la faiblesse des moyens humains et financiers, la faible reconnaissance de leurs missions et de leurs spécificités par rapport aux autres fonctions de l’entreprise. Ils mettent l’accent aussi sur la difficulté du travail quotidien avec des circuits de validation complexes et un sous-investissement des managers dans la fonction communication interne. Même si les propos de M. Rachid, responsable de la communication interne au sein d’une PME en disent autres choses : « La communication interne est une fonction source de fierté, car porteuse de sens, interconnectée à tous les publics de l’entreprise et au cœur de son management, mais encore sous-investie et faiblement reconnue au regard de ses enjeux ». Pourtant selon Mme MERYAM La communication interne ne répond pas aux aspirations du capital humain de l’entreprise.  Les supports et moyens de communication existent bel et bien (des tableaux d'affichage, un journal interne, un livret d’accueil), mais ils sont déficients et d’un usage temporaire selon l'urgence du moment. La transformation digitale de la fonction communication interne est loin d’être prise en considération, comme les autres fonctions de l’entreprise : ressources humaines, audit, finance et comptabilité§20 responsables parmi les 30 répondants : communication-marketing et communication globale,) pour qui le dispositif de positionnement et d’implication, s’opérationnalisent uniquement en approche de communication « outils classiques », dont les performances ne sont jamais évaluées. Ils estiment que pour la plupart des salariés, l’entreprise n'est qu'un lieu de travail. Ils n’éprouvent aucun sentiment d’appartenance. Mme LAYAL, nous confie que pour son entreprise, il n’existe aucun signe distinctif permettant d’identifier son entreprise de l’extérieur « : j’ai toujours réclamé l’uniformatisation, le nom, le logo, le slogan, l’architecture, charte graphique, uniformisation des documents.

  • 15 responsables de communication parmi les 30 répondants : responsables marketing et communication globale affirment ne pas disposer de dispositif de positionnement et d’implication tel qu’un système d'information, d’échange, des groupes assurant la régularité des informations et des échanges en entreprise. Ils avouent travailler « sous pression » face à l'incertitude d’un environnement à la recherche de plus de performance et de salariés en attente de plus de transparence.
  • 11 responsables de communication parmi les 30 répondants : communication globale, marketing et communication, communication interne, estiment qu’il n’existe aucun dispositif d’écoute organisée au sein de leurs entreprises, tel qu’un système d’information sur le capital humain de l’entreprise, allant au-delà de simples informations administratives. Les répondants dénoncent leur non disposition d’un tableau de bord social. Les réunions d’équipes et les feed-back manquent généralement de rigueur et d’efficacité. Mais ils restent néanmoins les moyens les plus utilisés pour communiquer. Bien que les réseaux sociaux gagnent rapidement du terrain, les entreprises interrogées affirment que leur usage est limité  aux cadres supérieures. Ils évoquent la surabondance, la vitesse des flux et la progression exponentielle du phénomène de l’infobésité. Le Blogging, le Microblogging, le chat ont envahi le cadre de vie et ont aboli la frontière entre espaces professionnels et personnels. Ainsi, le digital apporte son lot d'efficacité technique et économique dans un contexte économique difficile, où les évolutions technologiques et sociétales sont importantes et plus responsables. La digitalisation forme un nouvel écosystème de la communication interne de l'entreprise pour motiver, fidéliser et attirer de nouveaux talents et collaborateurs. 
  • 11 responsables de communication parmi les 30 répondants : responsables de communication globale, marketing et communication, communication interne) affirment qu’ils ne disposent pas de dispositifs de vigilance ni de maillage (colloques, forums, voyages, salons, séminaires), permettant aux salariés de l’entreprise d’être informés, sur les grands axes de développement de l’entreprise (produits, marchés, technologies de pointe à l’exception des cadres et des commerciaux). Ils qualifient, de ce fait, la communication interne de leurs entreprises de « mauvaise ». Elle demeure mobilisée vers la performance voulue par les dirigeants.
  • 11 responsables de communication parmi les 30 répondants, responsables de communication globale, marketing et communication, communication interne avouent eux qu’il n’existe aucun dispositif de coordination (de consignes clés procédures de supervisions directes réunions de coordination)
  • 11 responsables de communication parmi les 30 répondants : responsables de communication globale, marketing et communication, communication interne), regrettent l’absence de dispositif d’enrichissement professionnel ; ce qui constitue une véritable contrainte pour l’actualisation des connaissances ; le développement des compétences, l'adaptation aux évolutions socio-économiques et l’acquisition des nouvelles qualifications.

Dans cet environnement, tout le monde s'accorde pour mettre en avant l'importance primordiale du dispositif d’enrichissement professionnel comme étant un facteur clé de performance durable du "capital humain". Dans un contexte en pleine mutation, et un climat économique plutôt morose, si une entreprise ne dispose pas du dispositif d’enrichissement professionnel, elle risque de perdre en productivité et en rentabilité. Ceci-dit, Les entreprises commencent à comprendre que, si l'on veut des clients satisfaits, il faut des salariés impliqués et motivés », remarque un DIRCOM « On ne peut pas avoir un bon rapport avec un client si les individus par qui passe le message n'en sont pas totalement convaincus et n'aiment pas leur métier.

ANALYSE ET DISCUSSION 

Déterminons, à présent, quelle analyse donner à ces résultats et vers quel genre de discussions peuvent-ils aboutir. Dans un environnement économique, plutôt morose, tous les acteurs reconnaissent l’importance primordiale du « capital humain » comme étant un facteur clé de performance durable de l’entreprise. Reste à savoir quel rôle à jouer pour la communication interne dans ce chantier innovant pour en faire un véritable levier de développement du capital humain de l’entreprise. Il est vrai que plupart des responsables interrogés ont pris conscience qu’ils doivent repositionner la fonction communication interne. Pour qu’elle devienne une fonction d’appui et de support au mangement de leurs entreprises.  Ces dernières pour qu’elles soient considérées comme une valeur sûre, doivent disposer d’une réelle stratégie de communication interne qui repose sur des valeurs, telles que : la satisfaction cliente, une bonne qualité de vie au travail, une implication réelle du capital humain, une vraie affectivité émotionnelle et solennelle à l’égard de l’entreprise. Des valeurs considérées comme des repères inspirants et motivants pour en faire le moteur de la performance et de crédibilité des entreprises étudiées. Les responsables de communication interrogés confèrent à la communication interne un rôle de motivation et de facilitateur d’intégration. C’est une fonction porteuse de sens, interconnectée à tous les publics de l’entreprise, mais encore sous-investie et faiblement reconnue. Le capital humain des entreprises étudiées doit bénéficier d’un droit de revalorisation de leurs potentiels pour s’investir totalement dans leurs missions et objectifs. Le capital humain doit retrouver du sens malgré la charge de travail, la lourdeur des circuits. Comme le confie avec humour M.Nabili, responsable de communication et marketing dans une entreprise de pêche maritime : « on est tellement satisfait qu’on ne voit pas le bout ». Ceci étant dit, les dimensions d’écoute organisée devraient continuer à contribuer à faciliter la compréhension des enjeux de l’entreprise. Bien conscients des difficultés de l’exercice de leurs fonctions de communicants internes, les responsables interrogés réclament clairement la réhabilitation du rôle stratégique de la fonction communication interne dans la transformation de l’entreprise, à travers les différents dispositifs de communication interne cités dans ce présent article en les positionnant davantage comme des facilitateurs de la créativité et de l’intelligence collaborative au sein de leurs entreprises. Sans oublier de continuer à exploiter au mieux les opportunités du digital. Toutefois, les communicants internes déclarent que l'obsolescence des technologies mises à leur disposition, constituent l’un des freins majeurs à leurs déploiements et sur la performance du capital humain. Il en résulte plusieurs effets pervers dont :

  • La perception fugace et superficielle de la communication interne,
  • Le déficit de productivité,

Là encore, seule une réflexion stratégique sur la synergie des canaux de communication s’impose pour faire le bon choix des outils et des supports de communication interne pour promouvoir les bons comportements contre le déficit du capital humain de leurs entreprises. Ainsi, la communication interne doit s'appuyer sur les changements sociétaux qui se déroulent au-delà du périmètre de l'entreprise. Or, force est de constater que le contenu et les supports de ces messages ne sont pas toujours accessibles à tous. Au vu de l'ensemble de ces premiers résultats de recherche, des pistes de réflexion sont proposées par les différents responsables de communication des entreprises interrogées, en l’occurrence :

  • Faire basculer la fonction communication interne vers l’ère de la transformation digitale. Le but étant la modification des comportements communicationnels du capital humain vers plus de performance collective et intelligente.
  • Développer les outils de communication innovants, ambitieux et puissants pour garantir une performance innovante et intelligente.
  • Mettre en place des mécanismes de reconnaissance et de valorisation systématiques, autour des initiatives collectives de l’entreprise.
  • Encourager l’apprentissage du numérique et faciliter l’acculturation digitale de tous les collaborateurs en les plaçant au centre du dispositif. Une entreprise doit, à la fois, impliquer et rendre autonomes son capital humain.
  • Faire passer la communication interne d’un simple outil de diffusion d’information à un outil de transformation visant à modifier les comportements vers plus de performance.
  • Restructurer les dispositifs de communication interne actuel professionnaliser les équipes en les dotant de moyens adaptés.
  • Développer des outils de communication innovants, ambitieux voire puissants en prenant soin d’évaluer avec précision leurs performances.

CONCLUSION

En guise de conclusion, nous rappelons que notre article s’est inscrit dans le cadre d’une recherche exploratoire sur la place de la communication interne dans le management de la performance du capital humain des entreprises familiales du grand Agadir. Notre objectif consistait à montrer les répercussions d’une communication interne mal maîtrisée, sur la performance du capital humain des entreprises familiales. Pour mieux cerner la situation, nous avons mené exclusivement des entretiens semi-dirigés individuels. Le but étant de récolter la vision de ceux qui sont chargés de piloter la communication interne au sein des entreprises étudiées. Ces derniers nous ont fourni des éléments de réponse sur ce qu'elles pensaient de la communication interne de leurs entreprises et de son apport sur la performance du capital humain. Notre choix s’est porté sur cinq dispositifs de communication interne utilisables dans toute approche d’audit de la communication interne en entreprise à savoir : le dispositif de positionnement et d’implication, le dispositif de vigilance et de maillage, le dispositif d’écoute organisée, le dispositif d’enrichissement professionnel, le dispositif de coordination. Ces cinq dispositifs constituer un paradigme et reposent sur une base épistémologique qui se veut opérationnelle. Donnant suite aux entretiens réalisés une analyse approfondie a été menée pour faire ressortir der préconisations d’améliorations pour permettre à la communication interne d’apporter une valeur ajoutée dans le management de la performance du capital humain des entreprises familiales étudiées. L’étude a révélé que le positionnement actuel de la fonction communication interne dans les entreprises étudiées n’encourage pas la performance globale de son capital humain et tend à la recroqueviller sur lui-même. Il en ressort aussi, que « la communication interne » bute sur la rudesse de certains dirigeants des entreprises étudiées. Ces derniers devraient envisager la communication interne comme une locomotive de développement de la performance du capital de leurs entreprises. Plusieurs questions restent encore à l’étude à l’ère du collaboratif où le capital humain des entreprises interagit, de plus en plus, sans intermédiaire, quel sera alors le nouveau rôle de « la communication interne » au sein des entreprises étudiées ? Face aux nouveaux outils, à la démultiplication des flux d’information, comment assurer, par ailleurs, un minimum de cohérence ?

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Entreprises familiales : Un modèle gagnant, mais fragile, sources : https://leseco.ma/   

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