N°5 / Processus de normalisation et durabilité de l’information

Le modèle SOLARIS pour pérenniser l'élaboration, le partage et l'hybridation de savoirs dans la complexité

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Thomas Bonnecarrere

Résumé

Notre communication présente notre modèle SOLARIS[1] en développant la structure facilitant l'élaboration, le partage et l'hybridation d’œuvres culturelles SOLIS[2] et SOLARIS, encodant en leur sein des savoirs complexes et synergisants[3]. Ce modèle, déjà expérimenté avec succès, répond à des procédures d'élaboration et d'utilisation définies dans des matrices assurant les règles fondamentales d'interopérabilité. Cet article vise ainsi à permettre une compréhension claire de notre modèle (structure et utilisation) et de ses enjeux dans la complexité. La première partie résume la méthodologie que nous avons développé pour accompagner l'expérimentation de ce modèle. Puis, nous introduisons ce modèle, ainsi que les enjeux liés à sa normativité. Enfin, nous analysons les premiers retours analytiques et expérimentaux de notre modèle, permettant d'illustrer la mise en œuvre d'une démarche de travail collaboratif visant la production de savoirs collectifs et communs par le biais de ce modèle.

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Abstract: This communication focuses on our model for elaborating, sharing and hybridizing knowledge named SOLARIS. We approach different modalities structuring the elaboration, the sharing and the hybridization of SOLIS and SOLARIS cultural works encoding complex and synergistic knowledge. We are presently experimenting it. This model is based on clearly defined elaboration and utilization processes within matrices defining fundamental interoperability rules. This paper aims at a better comprehension of our model and at its issues in the increasing complexity. First we present the methodology that we developed to support, design and experiment our model. Then, we introduce this model, as well as the issues related to its normativity. Finally, we present the first analytical and experimental returns of our model, in order to illustrate the implementation of a collaborative work approach aiming at producing collective and common knowledge through this model.

Keywords : collective intelligence, knowledge management, culture, creativity, documentation, popular education

 

INTRODUCTION

Le savoir constitue la clé de l'avenir de l'humanité. La capacité des individus et des organisations sociales à élaborer et affiner le savoir afin d'alimenter une intelligence collective universelle (Lévy, 1997) est ainsi une condition sine qua non pour appréhender de manière efficace (i.e., de manière intelligible, sensible et stratégique) les nombreux problèmes complexes de notre époque.

Nos sociétés fortement technologisées sont cependant de plus en plus sujettes à une enclosure dans des systèmes techniques machinistes privateurs captant les savoirs humains, dépossédant les individus et les organisations de leur faculté à élaborer du savoir. Ce phénomène d'« incapacitation généralisée » (Stiegler, 2012) induit un affaiblissement de plus en plus important des capacités régénératrices et transformationnelles de nos sociétés dans la complexité croissante. De plus, la science et les discours scientifiques n'irriguent pas suffisamment la société, les croyants étant dans nos sociétés médiacratiques[4] beaucoup plus prosélytes que les savants (Klein, 2018). Ceci induit une perte générale d'intelligibilité sur, par exemple, des sujets aussi complexes et importants que l'effondrement écologique. Réhabiliter le savoir social (savoir-vivre, savoir-faire et savoir-penser) en favorisant le développement d'une réelle « maîtrise intellectuelle » de la connaissance (id.) est ainsi, selon nous, l'un des grands enjeux de notre époque.

Nous avons, dans ce contexte, conçu un modèle d'élaboration, de partage et d'hybridation de savoir basé sur la fusion entre l'intelligence stratégique, l'imaginierie stratégique (comme conception de stratégies d'évolution dans la complexité) et l'éducation populaire (comme travail de la culture dans la transformation sociale).

PROBLÈME DE RECHERCHE

Nous avons choisi pour notre communication la problématique suivante : Comment faciliter de manière documentaire la mise en œuvre d'une démarche collaborative, contributive et créative d'élaboration de savoir commun ? 

MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE DANS LAQUELLE S'ANCRE LE MODÈLE SOLARIS

Le modèle SOLARIS constitue une dimension fondamentale de la méthodologie de recherche que nous avons élaboré dans le cadre d'une recherche – action (nommée Imaginaeria), qui vise à appréhender, à l'échelle territoriale et interterritoriale, l'effondrement écologique impactant notre civilisation « thermo-industrielle » (Servigne, 2015).

Notre méthodologie de recherche se base sur deux dimensions fondamentales de la recherche scientifique. Pour le développement théorique du modèle SOLARIS, nous avons opéré un dialogue entre deux dimensions de la recherche scientifique :

  • Recherche fondamentale (via un enrichissement du champ épistémologique par le biais de notre matrice « tétrade logiscénique[5] » et notre démarche « épistémo-agnotologique[6] ») ; et
  • Recherche – action (démarche praxéologique). Concernant cette dimension pratique, nous nous sommes basés sur les travaux de nombreux praticiens engagés dans le domaine de la recherche contributive et, plus globalement, de la science ouverte citoyenne[7].

Nous avons, pour ancrer ce modèle dans une méthodologie scientifique rigoureuse, développé une méthodologie de recherche – action (nommée « recherche - rêsoaction[8] ImagineerInt »). Celle-ci est ancrée dans le paradigme des Communs de capabilités[9] et repose, notamment, sur une fusion entre trois praxis : l'intelligence stratégique, l'imaginierie stratégique et l'éducation populaire afin de faciliter l'appréhension de la complexité croissante. Ce cadre méthodologique facilite ainsi par design l'émergence et la mise en commun des idées, informations, connaissances, savoirs et ignorances au sein d'organisations sociales créatives, apprenantes et évolutives.

La méthodologie scientifique du SOLARIS repose sur l'hybridation de savoirs académiques (généraux) et expérientiels (singuliers) via une reliance expérientielle entre les deux, et entre les différents savoirs « froids » corrélés afin :

  • D'établir, au travers d'expérimentations collectives, d'éventuels liens de causalité menant à des théories déjà existantes ; et/ou
  • D'introduire de nouvelles idées créatives pour faire évoluer les savoirs, afin de favoriser la nature dynamique évolutive du savoir.

Les pratiques de conception fragmentée du savoir participent, dans le cadre du modèle SOLARIS, à des intentionnalités de recherches collaboratives et contributives sur une base ouverte et distribuée de pair-à-pair. Certains mécanismes à l’œuvre dans ce processus collaboratif et contributif participent aux mutations du statut du document scientifique : de connaissance figée et inerte à savoir « vivant » évolutif et ancré dans un rapport social. En d'autres termes, une ressource utilisable dans la transformation sociale afin de développer et renforcer la résilience et la régénération sociale dans un contexte de complexité croissante. Notre travail de conception du SOLARIS s'ancre dans un processus culturel visant à fabriquer collectivement du savoir légitime en partant des expériences personnelles, les affects pouvant être transformés en savoirs politiques en servant de porte d'entrée vers une analyse systémique. Ce processus d'émancipation culturelle permet ainsi de comprendre, au travers d'un travail personnel de récit, que la situation dans laquelle les individus se trouvent n'est pas individuelle / personnelle mais systémique, afin de changer notre manière d'observer la société, en créant collectivement un espace de débat social.

PRÉSENTATION DU MODÈLE SOLARIS ET DE SA STRUCTURE DOCUMENTAIRE

Résumé du modèle SOLARIS

Le modèle SOLARIS repose sur le concept d'hybridation des savoirs « froids » (académiques) et « chauds » (expérientiels de vie) afin de co-construire du savoir riche, complexe et « humanisé » partageable pour éclairer l'analyse, la décision et l'action collective dans la complexité. Le concept sous-jacent au modèle SOLARIS est ainsi centré sur la conscientisation, l'élaboration, la connexion et l'hybridation de savoirs singuliers synergisants. Un « savoir singulier » signifie un savoir issu de l'expérience de vie d'un individu, qui traduit sa subjectivité et son expérience personnelle incomparable et non « interchangeable ».

Le SOLARIS est conçu pour favoriser par design[10] la co-construction – sur une base collaborative et contributive – de savoirs hybrides alimentant une intelligence collective ancrée dans la science ouverte (recherche contributive) et l'éducation populaire (Maurel, 2010 ; Lepage, 2012). Ce modèle est centré sur trois processus fondamentaux concernant le savoir scientifique :

  • Le développement : Via un processus d'hybridation de savoirs « froids » et « chauds » selon une logique transdisciplinaire ;
  • La protection : Via un auto-hébergement des données de recherche au sein de « forêts SOLARIS » (patrimoines culturels épistémiques communs gérés localement) dont l'intégrité et pérennité (dans sa dimension infrastructure technique) sont garanties par des communautés territoriales engagées dans l'utilisation de ce modèle. Cette stratégie vise à lutter contre les phénomènes de centralisation des données au sein d'écosystèmes techniques fermés détenus et contrôlés par des entités privées ;
  • La valorisation : Via une synthèse des savoirs hybrides selon un encodage narratif clair et attractif (nommé SOLEN[11]), visant à favoriser une reliance affective (humaniser le savoir) et une inspiration chez le public.

Ce modèle peut être appréhendé sémantiquement par deux analogies :

  • Le jeu de briques de construction (type Lego) : Chaque savoir singulier SOLIS (une brique) peut par design être connecté avec une potentielle infinité d'autres savoirs SOLIS afin de construire une potentielle infinité de raisonnements scientifiques créatifs SOLARIS ;
  • L'arbre de raisonnement : Chaque savoir SOLIS est une « graine » contenant un code normatif favorisant l'émergence d'une potentielle infinité de connexion avec d'autres SOLIS, pouvant induire des raisonnements scientifiques complexes élaborables. En d'autres termes, ces savoirs contiennent virtuellement (au sens de Lévy, 1994) des « arbres de raisonnement SOLARIS » pouvant intégrer une multitude de branches exploratoires conduisant à l'exploration d'hypothèses secondaires ancrées dans une hypothèse principale définie dans le « tronc » commun épistémique (stable et invariant au cours du temps) de cet arbre.

 

 2018 revue bonnecarrere

Figure 1 : Schéma illustrant le principe de construction d'arbres de raisonnement SOLARIS

 

Le SOLIS constitue ainsi un savoir singulier issu :

  • D'un raisonnement scientifique localisé portant sur l'observation contextualisée d'un objet (endroit x et instant T) ;
  • De l'analyse scientifique d'un objet nouvellement créé (comme nouvel élément de réalité à partager au monde) ; ou
  • De l'introduction et poursuite raisonnée d'une idée intuitive faisant émerger de nouvelles possibilités théoriques et expérimentales stimulant la démarche scientifique basée sur la recherche contributive.

Ces différents savoirs singuliers sont enrichis d'une dimension évolutive. Leurs auteurs sont ainsi enjoints à imaginer, en accompagnement de la description de leur élément de réalité, de nouvelles possibilités d'évolution via la formulation de nouvelles idées visant à enrichir ce savoir dans la compréhension / analyse de cet objet. Ce processus vise à stimuler la mobilisation d'intelligence collective par connexion et hybridation de nouveaux savoirs froids et chauds pouvant enrichir la lecture collective, renforcée par une démarche d'intelligence stratégique.

Le SOLIS vise donc à :

  • Partager avec une communauté mondiale un « morceau » de réalité localisé (observé de manière qualitative ou quantitative) pour alimenter voire stimuler (si original / exceptionnel, i.e., en inadéquation avec une ou des lois / régularités existantes) la dynamique de raisonnement scientifique ;
  • Partager des expériences singulières localisées (induction) en vue d'établir des corrélations (reliance expérientielle) et, éventuellement, déboucher sur des causalités pouvant mener à la découverte de lois (réalité objective) ou de régularités (réalité sociale). La matrice de ce savoir vise également à maintenir les raisonnements évolutifs, en intégrant de nouvelles idées / concepts traduits sous forme d'énoncés causaux créatifs[12] (logique abductive ou imaginactive) inspirant et stimulant le processus d'intelligence créative et inventive nourri par une libido sciendi (comme désir d'apprendre, d'explorer et de découvrir).

Le SOLARIS est, quant à lui, construit via la connexion et hybridation de SOLIS afin de favoriser l'élaboration de raisonnements glocalisés reposant sur l'hybridation de plusieurs observations / interprétations provenant de divers endroits et instants, afin d'enrichir l'analyse scientifique de cet objet. Ce savoir hybride est plus généralisant car issu de l'hybridation de plusieurs observations (e.g., répliquant la même expérience scientifique mais avec des contextes géographiques et sociaux différents) et de plusieurs raisonnements singuliers. En d'autres termes, il reflète une réalité plus complexe issue de la reliance entre plusieurs « bribes » de réalité localisées augmentant sa valeur scientifique. 

Les objectifs du raisonnement SOLARIS

Les raisonnements SOLARIS consistent à appréhender de manière créative, critique et méthodique le réel pour mieux l'enrichir / le transformer. On conduit ainsi des raisonnements pour des objectifs spécifiques qui peuvent se combiner :

  • Conduire la démonstration d'une théorie afin de tester sa solidité ;
  • Imaginer et tester la pertinence de nouvelles idées (sous forme d'énoncés « faillibles ») stimulant le raisonnement scientifique créatif ;
  • Éclairer la prise de décision collective dans la complexité.

Le modèle SOLARIS permet ainsi d'appréhender de manière rigoureuse l'appréhension de problèmes :

  • Compliqués (requérant la recherche de solutions, e.g., formule mathématique / algorithme automatisant des tâches pour produire des résultats spécifiques en fonction de règles de design spécifiques) ; et
  • Complexes (requérant une recherche d'évolution afin d'appréhender l'objet d'étude ; e.g., hyperobjet[13] nécessitant un changement de paradigme, de réductionnisme cloisonnant à complexité reliant et distinguant selon une relation dialogique).

PRÉSENTATION DES MODALITÉS NORMATIVES ENCADRANT L'ÉLABORATION DES RESSOURCES SOLIS ET SOLARIS

Présentation synthétique du système de normalisation du modèle SOLARIS

La normalisation documentaire du modèle SOLARIS vise à structurer et faciliter l'élaboration, le partage, l'hybridation et la protection des ressources culturelles constituant le « patrimoine épistémique commun » HyperSOLARIS[14]. La structure documentaire des matrices d'élaboration de savoir SOLIS et SOLARIS vise à favoriser la reliance entre les différents savoirs « froids » et « chauds » et, ce faisant, les connexions entre SOLIS et SOLARIS sur une base ouverte et distribuée. Morin dans La Méthode 6 (p.296) souligne que

La notion de reliance, inventée par le sociologue Marcel Bolle de Bal, comble un vide conceptuel en donnant une nature substantive à ce qui n’était conçu qu’adjectivement, et en donnant un caractère actif à ce substantif. ‘Relié’ est passif, ‘reliant’ est participant, ‘reliance’ est activant.

Le psychologue cognitif Jerome Bruner (1986, p.11) affirme quant à lui que les êtres humains ont deux modes de fonctionnement cognitif, deux modes de pensée, chacun offrant des moyens distinctifs pour commander des expériences et construire la réalité :

  • Le mode paradigmatique ou logico-scientifique, que nous utilisons pour construire un argument ; et
  • Le mode narratif, que nous utilisons pour raconter une histoire.

Dans le cadre de l'élaboration d'un SOLIS, l'auteur est enjoint à mobiliser ces deux modes de pensée afin d'élaborer un savoir réellement rigoureux, reliant et savoureux[15].

Les différents « blocs thématiques » constituant le SOLIS

En se basant sur ces analyses, nous avons conçu une matrice d'élaboration de savoirs SOLIS structurée stratégiquement afin d'orienter les individus vers un raisonnement rigoureux et méthodique. Cette matrice est constituée de sept « blocs thématiques » successifs[16] :

1.Thématique : Résumé normé du document pour favoriser son indexation et traitement cognitif futur. L'auteur d'un SOLIS doit inscrire :

  • Le titre de son SOLIS ;
  • La nature de ce savoir (observation personnelle, création personnelle ou bien idée nouvelle) ;
  • Les mots-clés, qui sont de deux types :
  • Centraux : doivent décrire le contenu du savoir élaboré ;
  • Périphériques : doivent introduire les thématiques que l'auteur du SOLIS souhaiterait voir connectées à son savoir à l'avenir.

2. Raisonnement et contexte : Présentation d'une observation, d'une création ou d'une idée intuitive à explorer / tester. L'auteur est ici invité à raisonner de manière rigoureuse sur son savoir. Ainsi :

  • Un individu souhaitant partager une observation doit décrire :
  • La nature de son observation ;
  • Le contexte (géographique et social) dans lequel celle-ci a été faite ;
  • Ce qui a, selon lui, pu causer l'objet / le phénomène observé ;
  • Ce qui l'a éventuellement surpris par rapport à des croyances / attentes préalables.
  • Un individu souhaitant présenter une création doit décrire :
  • La nature de sa création ;
  • Le contexte dans lequel il l'a créée ;
  • Ce qui, selon lui, a pu l'amener à créer ce nouvel objet.
  • Un individu souhaitant proposer une nouvelle idée doit décrire :
  • Cette idée sous la forme d'un énoncé testable : « Et si… ? Alors je pense que... » ;
  • Le contexte dans lequel lui est venue cette idée.

3. Souffrances / ressenti : L'auteur doit décrire les problèmes expérientiels qu'il a vécu et qui lui auront procuré des souffrances (ou, tout du moins, une gêne / insatisfaction) afin de stimuler l'analyse via la mise en évidence de problèmes à résoudre ou appréhender.

4. Résolution / appréhension : L'auteur est incité à réfléchir à de possibles solutions / voies d'appréhension du/des problèmes mis en évidence (échelle individuelle et collective).

5. Limites du savoir : L'auteur doit exposer différentes limites (biais / failles) de son savoir : axiomes, choix des outils, biais dans la sélection des données analysées suite à une expérience, position géographique d'une observation, ou encore nature des outils utilisés pour effectuer cette observation. Enfin, il est amené à réfléchir et à décrire les limites liées à la conclusion qu'il a tiré de son observation.

6. Ancrage du savoir dans une progression écologique et sociale : L'auteur est enjoint à relier son savoir personnel avec une progression coopérative et contributive de la société / humanité selon une logique de coopération et de contribution synergique.

7. Désir d'évolution du savoir : L'auteur est encouragé à se projeter dans le futur de son savoir, en imaginant :

  • Ses possibles évolutions / transformations (bifurcations dans le raisonnement scientifique vers de nouveaux horizons théoriques / expérimentaux,…) désirées ou non désirées ;
  • Des stratégies possibles pour soit favoriser, soit éviter leur survenance (e.g., pour des raisons éthiques ou morales).

Puis, il est incité à cartographier de possibles nouveaux savoirs potentiellement utiles pour enrichir ou améliorer le sien. Enfin, il est encouragé à imaginer dans quels champs de la société son savoir peut être transposé, afin de favoriser la reliance créative entre différents champs et stimuler la pensée créative analogique.

Les trois connecteurs fondamentaux du SOLIS

Comme dit précédemment, le SOLARIS repose sur un concept de « briques de construction » facilement connectables via un système documentaire favorisant par design une interopérabilité et une reliance cognitive et affective. Les trois « connecteurs » fondamentaux d'un savoir SOLIS sont ainsi :

  • La mise en évidence des limites épistémiques : Les auteurs sont enjoints à tenter, par exemple :
  • De combler les lacunes d'un savoir issu d'une observation d'un objet spécifique en développant, par exemple, un protocole expérimental plus riche et rigoureux ;
  • De diversifier les manières d'observer un objet, afin d'augmenter la complexité de son analyse ;
  • De répondre à des ignorances formalisées dans un ou plusieurs SOLIS, afin de favoriser leur enrichissement.
  • La reliance expérientielle : Les auteurs peuvent se relier affectivement aux émotions et ressentis d'autres auteurs, de par le bloc thématique centré sur l'expression des affects « humanisant » ces savoirs ;
  • Les aspirations concernant l'évolution du savoir : La formalisation de désirs concernant l'évolution de savoirs SOLIS facilite la reliance entre des aspirations communément partagées par les utilisateurs de ce modèle ; par exemple, des visions collectivement désirées concernant une thématique spécifique, ou encore des valeurs ou un code éthique communs rejetant certaines voies d'évolution du savoir contraires aux sensibilités de leurs auteurs.

RESULTATS

La première expérimentation de ce modèle a été menée par un ingénieur en mécanique dans le cadre d'une situation complexe au sein d'une multinationale. Le résultat a été la sauvegarde de 600 emplois et une économie de 2 millions d'euros par an pour l'entreprise.

La deuxième expérimentation a été menée dans le cadre de notre recherche – action. Nous avons au cours de notre expérimentation récolté huit SOLIS rédigés par :

  • Un ingénieur en mécanique ;
  • Un chercheur en informatique ;
  • Un artiste sculpteur ancien professeur des écoles ;
  • Un tatoueur ;
  • Un entrepreneur social ;
  • Un mécanicien – formateur ; et
  • Un élève (11 ans).

La formation préalable de ces acteurs à l'utilisation de notre modèle n'a pas excédé deux heures. Cela nous a été suffisant pour exposer le modèle SOLARIS dans son ensemble, à savoir sa dimension théorique et pratique.

Ces huit savoirs singuliers traduisent, pris dans leur ensemble, les trois catégories de raisonnement proposées par notre matrice SOLIS : observation, création ou idée nouvelle à tester.

Leur connexion et hybridation a permis de faire émerger des connexions intellectuelles et affectives assez surprenantes. Les exemples les plus clairs sont :

  • Le désir profond de ces acteurs (formalisé de la sorte) de partager leur savoir pour se connecter à d'autres intelligences afin de capaciter les individus dans notre société ;
  • L'intérêt communément partagé par trois acteurs ne se connaissant pas pour la thématique de l'électronique embarquée dans les automobiles, et pour les problèmes écologiques et sociaux fondamentaux que cette « innovation » pose (épuisement des ressources et incapacitation des individus concernant ces systèmes techniques privateurs). Cet objet d'étude commun (qui induit actuellement une concertation dynamique entre ces acteurs) a émergé grâce à l'intégration dans notre matrice SOLIS des trois connecteurs fondamentaux que nous avons présenté ; et
  • Le fait que deux SOLIS, rédigés par deux personnes ne se connaissant pas et qui ont expérimenté notre modèle séparément (sans se concerter sur le choix de leur sujet) portent sur la même thématique qu'est la discrimination sociale par rapport aux préjugés de certains enseignants concernant leurs élèves (et le danger que cela peut induire pour les enfants). Le premier SOLIS, écrit par un ancien professeur des écoles, décrit ainsi ce problème du point de vue d'un enseignant ayant observé ce phénomène chez certains collègues, tandis que le deuxième le décrit au travers du regard d'un élève ayant été victime de ce phénomène social.

Les SOLIS élaborés par ces différents acteurs aux profils variés ainsi que les entretiens que nous avons menés avec eux traduisent selon nous un réel intérêt pour notre matrice d'élaboration, de connexion et d'hybridation de savoir. Les expérimentateurs de notre modèle ont ainsi, si nous nous basons sur les données qu'ils ont produites durant ce processus de co-construction d'intelligence créative, bien compris le modèle SOLARIS aussi bien dans sa dimension pratique que dans sa dimension théorique. L'ensemble des acteurs a affirmé n'avoir pas eu de véritable problème pour s'approprier nos matrices.

Comme nous l'anticipions, certains SOLIS se sont avérés plus riches en termes de contenu que d'autres, mais il nous faut souligner que cela n'a engendré aucun problème de discrimination ou de jugement de valeur parmi les expérimentateurs pendant l'analyse collective de ces savoirs. Au contraire, nous avons observé l'émergence d'une réelle empathie ainsi qu'un intérêt mutuel porté par chacun aux expériences singulières des autres, encodées dans ces œuvres personnelles. Cette reliance à la fois intellectuelle et affective a clairement, selon nous, favorisé la connexion sociale entre ces différents acteurs, et stimulé par extension la dynamique créative collaborative au sein de ce groupe.

En guise d'illustration, nous souhaitons retranscrire un retour écrit formulé par un chercheur en informatique ayant fait partie de ce « groupe test » :

Il me semble que l'outil SOLARIS se prête parfaitement à la démarche de recherche, quelle soit à visée fondamentale ou appliquée. Premièrement, le scientifique peut décrire formellement et exhaustivement une observation, une idée ou une réalisation qu'il souhaite partager avec ses pairs. La communauté scientifique peut ensuite bâtir des arbres de raisonnement complexes (SOLARIS) en connectant plusieurs « briques de base » entre elles (les SOLIS) pour explorer de nouvelles idées intellectuellement stimulantes et produire des résultats innovants. .Le modèle SOLARIS est, je pense, tout à fait représentatif de l’idée d'éducation populaire si l'on conçoit celle-ci comme une pratique éducative et culturelle « horizontale » reposant sur le partage d’expériences et de savoirs entre pairs. En effet, les outils constitutifs du modèle SOLARIS permettent à tout un chacun de décrire précisément un savoir puis de le partager largement et sans discrimination. En reconnaissant comme légitime toutes les formes de savoirs et de cultures, le modèle SOLARIS incite à la participation de tout un chacun à l'élaboration du savoir collectif. La mise en réseau des savoirs singuliers contribue au décloisonnement de la connaissance et à la libre diffusion des savoirs. De ce processus émerge finalement un savoir collectif et des moyens d'action – collectifs – non préalablement soupçonnés. Ce processus s'inscrit dans une perspective d'émancipation et de « capacitation » (empowerment) individuelle et collective caractéristique de l'éducation populaire. L'expérience du modèle SOLARIS à laquelle j'ai participé illustre cette démarche. Nous avons été capables de collecter des SOLIS auprès de personnes aux profils très divers – artistes, techniciens/praticiens, ingénieurs, scientifiques, etc. En consultant ces SOLIS, j'ai pu constater nombre de données communes (valeurs, analyses personnelles, ressenti, etc.) ou convergentes (recherche de collaboration par exemple), sans que les participants à l'expérience ne se connaissent ni qu'ils aient préalablement formalisé ces données. Notamment, une thématique commune à plusieurs SOLIS s'est dégagée sur le thème de l'informatique embarquée qui est mon domaine d'expertise. Ce fut un résultat tout à fait surprenant. La connexion de ces savoirs singuliers à donc d'ores et déjà contribué à l'émergence d'un savoir collectif qui débouchera, pourquoi pas, sur des actions collectives.

PREMIERS RETOURS ANALYTIQUES CONCERNANT LA STRUCTURE ET LE FONCTIONNEMENT DU SOLARIS

Nous souhaitons illustrer la présentation théorique de notre modèle avec deux analyses formulées, respectivement, par une enseignante-chercheuse et une ancienne enseignante et documentaliste. La sociologue Laurence Allard (2018, conversation personnelle), engagée dans une démarche de science ouverte citoyenne au sein de « fablabs » (laboratoires de fabrication citoyenne), analyse le modèle SOLARIS en ces termes :

Il y a avec le SOLARIS toute une grille (tout un circuit) qui me permet d'organiser des « jeux sociaux » reposant sur une participation collective pour co-construire du savoir. Je pense que le SOLARIS est très utile pour établir un pont entre le monde académique et le grand public. Ce modèle constitue un mélange subtil entre cadrage et liberté créative. Il permet d'explorer et de progresser au sein de parcours uniques dans le cadre d'une partie commune, avec cette idée que nous ne sommes pas orientés uniquement par la réussite, mais que nous partageons aussi des moments d’affect et des savoirs. Ce que j'aime dans ce modèle est qu'il inclut également l'échec et l'affect (qui ne sont pas vraiment présents dans les processus classiques d'idéation). Je vois ce processus comme une façon de questionner tout un ensemble de non-dits (doutes, échecs, souffrances) au sein des processus d'idéation et d'intelligence collective. C'est ainsi un outil que l'on peut utiliser de manière très efficace pour cartographier un processus d'idéation, en intégrant la complexité des problématiques d'intelligence collective dans toutes ses dimensions (pas seulement créer un savoir commun, mais faire interagir l'intellect et l'affect pour se connecter et se relier).

D'une certaine façon, cet outil permet de se « mettre au travail ensemble » de manière très concrète, via un guidage bien pensé (avec des niveaux comme dans un jeu). J'aime le définir avec la métaphore d'un parcours de jeu social, qui doit être nourri par les participants via des « pleins » (savoirs) et des « vides » (ignorances). Le SOLARIS contraint (au sens positif du terme) à se connecter aux autres, en cheminant ensemble comme dans une « quête » sous-jacente (on part à la recherche de quelque chose et nous ne savons pas au préalable ce qu'il se passera, ni ce que nous allons découvrir ensemble). J'aime beaucoup cette idée de parcours et de cheminement de pensée, qui n'est pas labyrinthique mais bien guidé.

Le SOLARIS permet de mieux construire un raisonnement créatif qui est à la fois dynamique et structuré. Dans un processus d'intelligence collective (comme « processus cognitif » commun), le SOLARIS constitue le « laboratoire cognitif ». Dans un contexte académique, il peut donc offrir un très bon outil accompagnant et guidant le processus de recherche scientifique. Je trouve que ce modèle est très proche de la génétique (avec son arborescence et sa généalogie de raisonnement offrant aux lecteurs et analystes une lecture claire avec une traçabilité assurée par son design). Il y a même un petit côté wiki, permettant de retracer et de recombiner le savoir. C'est donc une matrice disposant d'une dimension d'historicité et de cheminement des raisonnements collectifs, qui offre un « espace-temps » dédié à l'exploration de concepts et de savoirs interopérables et hybridables. Je dirais pour synthétiser mon analyse que ce modèle permet de se mettre en quête d'un savoir commun par le biais d'une approche créative et au travers d'une démarche ludique.

Une ancienne enseignante et documentaliste de l'éducation nationale que nous avons formé à notre modèle enrichit cette analyse, en intégrant la problématique de la durabilité cognitive et informationnelle induite par le SOLARIS et sa structure « génétique » universelle :

Quand je vois la structure de ce modèle (des  briques connectables grâce à un code commun), l'image qui me vient spontanément à l'esprit – par rapport à mon vécu, mon expérience et mes centres d'intérêt – est l'apprentissage fondamental et le recentrage qu'a constitué pour moi la découverte de l'unicité et de l'universalité de la cellule de tout être vivant. Cette connaissance traduit la richesse dans l'unicité, et a radicalement changé ma manière de penser, selon une base systémique. Tu peux transposer ce principe d'universalité à la communication : c'est alors le fait de devoir trouver une « brique » culturelle de base avec son interlocuteur, afin de se relier à lui sur la base de ce code culturel commun. La lecture des SOLIS rédigés par les expérimentateurs de ce modèle m'a ainsi rappelé le travail d'analyse systémique que j'ai effectué dans le cadre de la licence Sciences de l’Éducation. J'ai personnellement besoin de ce système de briques, afin de transformer des actes et des expériences qui en découlent en une position théorique et reproductible.

Grâce à la matrice SOLIS, chaque individu peut puiser dans son expérience personnelle, et structurer un raisonnement rigoureux grâce à ce code commun partagé par les utilisateurs du modèle SOLARIS. La documentation est une mise en cadre obligatoire (qui nécessite un tri et un recul) mais ne peut être efficace que si elle parle à l'histoire, au mental et aux connaissances de chaque individu. Ce cadre formel nous permet de nous poser des questions, en mobilisant notre bagage culturel. C'est très important car le système documentaire constitue la brique de base des démarches intellectuelles pour formaliser le savoir. L'entrée dans ce système, comme base de la pensée, va permettre la hiérarchisation des opérations intellectuelles : c'est à partir de cette base que l'on va étayer son raisonnement. Entrer dans le système documentaire, c'est apprendre à chercher, puis trier les informations, mais c'est aussi adopter une ouverture d'esprit et un recul propre à améliorer tous les niveaux de participation dans la société. La dimension évolutive du SOLIS permet de démocratiser l'apprentissage de l'analyse systémique. Il est ainsi nécessaire de penser en termes de structures et d'apprendre à prendre du recul en termes d'apprentissage des savoirs et d'acquisition de l'information. Le modèle SOLARIS constitue un outil parfaitement adapté à ces processus. Intérioriser sa structure peut ainsi favoriser la construction de savoir rigoureux par tout un chacun. Ce qui est devenu un habitus en matière de démarche intellectuelle « ne prend pas de place » : c'est l'acquisition d'un « réflexe conditionné » relatif aux savoirs. Le SOLARIS est transversal par nature : il s'agit donc de favoriser la diffusion de ce modèle dans tous les domaines pour encourager et stimuler, à partir de ce réflexe conditionné, l'hybridation de savoirs de manière durable et transversale. Les savoirs nécessaires pouvant être développés et valorisés grâce à ce modèle sont des savoir-être (curiosité, rigueur,…), faire et penser (avec des concepts structurant une pensée complexe) qui vont garantir cette durabilité. La mise en valeur du SOLARIS doit se faire nécessairement avec de l'humain. Il doit ainsi être transmis de manière vivante (avec de réelles relations humaines interagissant en direct) et pas seulement numérique. Ce modèle est très novateur, et son évolution est adaptable. Le SOLIS constitue la cellule de base d'un modèle de questionnement qui est adaptable à une infinité de problématiques. Il évolue avec chaque personne qui le « prend en charge », c'est-à-dire qui l'utilise sérieusement en accord avec ses règles de design. Ce faisant, la personne bénéficie d'une évolution personnelle et en retour apporte une évolution à ce modèle, ce qui in fine apporte des informations utiles au designer. Le SOLARIS est donc évolutif car il est interactif. Le modèle documentaire (en tant que démarche de documentation, que système d'acquisition de renseignement et de savoir) étant également interactif, puisque l'on réagit à de l'information ou à du savoir, ces deux modèles (le modèle documentaire et le SOLARIS) sont parfaitement complémentaires. Tout travail documentaire peut ainsi bénéficier de la mise en œuvre de SOLIS pour faire l'analyse de sa qualité.

DISCUSSION

Ces premiers retours visent à proposer à l'analyse critique l'introduction dans les champs de la recherche, de l'ingénierie et de l'éducation populaire de cette nouvelle approche épistémologique et praxéologique, via une connaissance contextualisée élaborée in situ.

Notre modèle, bien qu'ayant pour l'instant été expérimenté avec de très bons résultats dans le cadre de notre travail expérimental, est évidemment prototypaire et à vocation, selon notre souhait reflété dans son design, à être amélioré ainsi que traduit dans de multiples langues. Nous désirons ainsi voir ce modèle diffusé et critiqué de manière constructive pour pleinement développer son potentiel transformationnel dans le champ scientifique et, plus globalement, social.

L'expérience menée dans le cadre de notre recherche – action nous aura permis de poser les bases d'une réelle dynamique collaborative autour de l'évolution du modèle SOLARIS. Nous sommes ainsi en train de travailler avec différents acteurs à l'adaptation de notre modèle au cyberespace, en construisant une version numérique qui bénéficie de ce premier travail d'hybridation de savoir.

CONCLUSION

Nous avons tenté, à travers notre communication, de présenter une approche créative de co-construction de savoir visant à « décloisonner » les champs de la recherche, et à connecter efficacement le monde scientifique avec le champ social. Nous espérons ainsi contribuer, avec le SOLARIS, à faciliter les processus de développement et d'augmentation de sens (dans ses dimensions intelligible, sensible et directionnelle) au sein de notre société.

Réhabiliter le sens et la capacité à le produire et l'augmenter de manière continue nous semble ainsi un réel impératif pour appréhender un monde de plus en plus complexe, qui nécessite de développer une réelle intelligence collective augmentant et renforçant la résilience sociale. La durabilité de l'information stratégique et du savoir repose, selon nous, fondamentalement sur une capacité collective à régénérer des systèmes cognitifs actuellement victimes d'une « entropie psychique[17] » favorisée par une surabondance d'information produite et calibrée selon un principe d'obsolescence programmée.

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[1]     Acronyme signifiant « Savoir Opportunisant Libérateur Alimenté par un Réseau d'Intelligence Synergique ».

[2]     Acronyme signifiant « Savoir Opportunisant Libérateur Interopérable et Synergisant ».

[3]    La synergie renvoie à la mise en commun de moyens qui se renforcent entre eux afin d'aboutir à un même but. Dans le cadre du modèle SOLARIS, ce but est de développer, protéger et valoriser des savoirs hybrides issus d'intelligences multiples et diversifiées ancrées dans des cultures locales singulières savoureuses s'enrichissant mutuellement dans une logique de métissage.

[4]     Basé sur les expressions « démocratie médiatique » du psychologue social Jean-Léon Beauvois (2012) et « médiacratie » du philosophe Alain Deneault (2018). Ce dernier souligne que dans une médiacratie, l'information devient un flux (comme une « bande passante »), chaque élément chassant le suivant sans que rien ne gagne en consistance dans une structure de ce type.

[5]     La tétrade logiscénique est un schéma de raisonnement « encodé » dans la structure des matrices SOLARIS, sous forme de questions successives permettant de le développer. Ce schéma de raisonnement fait dialoguer déduction, induction, abduction et imaginaction afin d'élaborer des raisonnements scientifiques créatifs explorant des futurs « ouverts » supportés par – et non prisonniers de – connaissances théoriques existantes. L'imaginaction est ainsi un raisonnement créatif « rebondissant » sur des connaissances existantes (celles-ci servant de « tremplin » à l'imagination) afin de spéculer sur le futur d'un objet d'étude en explorant des idées créatives problématisantes formalisées sous la forme de scénarios « croyables » (Minvielle et al., 2016). L'objectif de cette démarche est de stimuler le désir d'acteurs de tester ces idées par le biais d'expériences en laboratoire, sur le terrain ou en pensée. Le raisonnement logiscénique permet de maintenir le raisonnement scientifique vivant, évolutif et non figé, i.e., non prisonnier d'un prisme logico-scientifique ancré dans une vision purement déterministe du monde. Les documents SOLARIS sont ainsi structurellement conçus pour favoriser l'approche intégrative de données en constituant un « jeu de données épaisses » stimulant l'analyse et l'inspiration créative. Voir, en guise d'analyse approfondie, un article que nous avons rédigé sur le sujet :  Bonnecarrere, T. (2018). Approche théorique du développement d'organisations territoriales intelligentes appréhendant la complexité selon une approche intégrative de données. Revue COSSI, n°1-2018 [en ligne].

[6]     Démarche de production et d'augmentation d'intelligibilité reposant sur un dialogue entre étude et construction de connaissance (épistémologie) et étude et construction d'ignorance (agnotologie).

[7]     Nous pouvons, par exemple, citer Franck Lepage, Bernard Stiegler et Claire et Marc Héber-Suffrin.

[8]     La rêsoaction est un néologisme que nous avons conçu afin de qualifier notre démarche expérimentale de recherche – action. Il fusionne les mots (et leurs sens respectifs) « rêve », « raisonnement » et « action », tout en renvoyant phonétiquement au mot « réseau ». La rêsoaction est, ainsi, une démarche scientifique mobilisant le rêve, le raisonnement et l'action en réseau ouvert, distribué et de pair-à-pair. Elle s'ancre, de ce fait, dans la science ouverte, la recherche contributive et les praxis intelligence stratégique, imaginierie stratégique et éducation populaire.

[9]     Paradigme renvoyant au développement de ressources communes capacitant les individus et les groupes, en leur conférant la possibilité de développer des savoirs les concernant (e.g., étude, modification,…).  Voir l'article du juriste et bibliothécaire Lionel Maurel définissant ce paradigme à cette adresse : https://scinfolex.com/2017/11/25/repenser-lenclosure-de-la-connaissance-avec-bernard-stiegler-et-amartya-sen/ (consulté le 16 novembre 2018).

[10]           Par design est une expression issue de la conception de systèmes, et signifie ici :

- Par conception (au cœur des règles définissant et structurant le système) ; et

- Par dessein (au cœur des intentions du concepteur concernant l'utilisation de ce système, selon un « modèle mental » en adéquation avec ses règles sus-citées).

[11]   Acronyme signifiant « Savoir Opportunisant Libérateur Esthétique et Narratif ».

[12]   Énoncés formulant des rapports causaux « faillibles » dont la pertinence peut être testée et les implications explorées (e.g., par le biais d'expériences de pensée, qui reposent sur l'imagination d'une expérience réalisée mentalement à partir d'une théorie que l'on considère comme juste, afin de tester la solidité ainsi que les implications et applications de celle-ci).

[13]   L'hyperobjet renvoie, pour le philosophe Timothy Morton, à une entité d’une étendue spatio-temporelle telle qu'elle « met en faillite l'idée même que nous nous faisons d'un objet, que l’on s’imagine habituellement pouvoir toucher ou tenir dans la main » (source : https://www.lesinrocks.com/2015/11/21/arts/les-hyperobjets-le-superconcept-qui-revolutionne-la-pensee-ecologique-11785368/ ; consulté le 16 novembre 2018). Le juriste Lionel Maurel (2017) intègre dans ce concept les objets techniques « fermés », c'est à dire des objets qui laissent leurs usagers ignorants des schèmes techniques actifs en leur sein.

[14]   Patrimoine épistémique glocal constitué par les différentes « forêts SOLARIS » alimentées et auto-hébergées (concernant les données numériques) à l'échelle locale par des communautés épistémiques territoriales.

[15]   La saveur fait ici référence au mot latin sapere, qui signifie « avoir de la saveur », « sage », « être perspicace », « comprendre » et « savoir ». Elle renvoie à la nature intelligible et sensible d'un « savoir singulier » SOLIS.

[16]   Le document « Matrice d'élaboration d'un SOLIS » peut être consulté à cette adresse : https://www.researchgate.net/publication/328998663_Matrice_d'elaboration_d'un_SOLIS_savoir_opportunisant_liberateur_interoperable_et_synergisant (consulté le 16 novembre 2018).

[17]   Mihály Csíkszentmihályi (1990) définit l'entropie psychique comme le désordre interne provoqué par une information qui survient dans la conscience et menace la poursuite d'un but. C'est, ainsi, une désorganisation du soi qui réduit son efficacité. Une expérience prolongée de cette sorte peut affaiblir le soi au point de ne laisser aucune attention (énergie) disponible et de contrecarrer complètement la démarche vers un but. Pour ce psychologue, chaque individu dispose d'une attention limitée qu'il peut orienter intentionnellement comme un rayon d'énergie ou qu'il peut disperser dans des activités décousues et aléatoires. Dans ce dernier cas, son attention n’est plus disponible et le sujet est obnubilé par lui-même. Au contraire, un événement positif qui trouve sa place dans la conscience est lié au soi, qui en ressort renforcé. Le sujet peut alors se consacrer à la poursuite de son but car son attention est disponible. La vie d'un individu ressemble donc, pour Csíkszentmihályi, à la façon dont il utilise son attention. L’attention est dirigée par le soi qui est la somme des contenus de conscience. Ainsi, le soi et l’attention se déterminent réciproquement.

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